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 simulacre & simulation

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MessageSujet: simulacre & simulation   simulacre & simulation I_icon_minitimeLun 10 Fév 2014 - 19:08

simulacre & simulation 9782718602103FS


Jean Baudrillard

D'origine paysanne, il est fils unique et son père est gendarme. Remarqué à l'école primaire par ses instituteurs, ceux-ci l'aident à intégrer le lycée et à devenir boursier1. C'est au lycée Henri-IV à Paris, où il prépare le concours d'entrée à l'École normale supérieure, qu'il fait sa première rupture radicale, à la fois amicale, amoureuse, studieuse et révolutionnaire, en tournant le dos au concours, pour aller s'établir comme ouvrier agricole puis maçon à la tâche, dans la région d'Arles. Il est ainsi considéré[réf. nécessaire] comme le premier intellectuel « établi » de France.
À son retour, il finit ses études supérieures à l'université des langues de la Sorbonne, et obtient le CAPES en allemand. Nommé successivement dans différents lycées en France, puis lecteur résident des universités en Allemagne et lecteur de littérature allemande aux éditions du Seuil, il traduit plusieurs ouvrages, notamment avec Gilbert Badia Dialogue d'exilés de Bertolt Brecht, pour l'Arche, Marat-Sade de Peter Weiss, d'autres avec Gilbert Badia, Henri Auger, et Renée Cartelle, pour les Éditions Sociales, ainsi que L'Idéologie allemande de Karl Marx. Il traduit également les poèmes de Hölderlin qui resteront inédits jusqu'à leur publication dans Les cahiers de l'Herne, en 2005. Il publie plusieurs articles critiques en littérature internationale dans Les Temps modernes.
De son premier mariage avec Lucile, il a deux enfants, Gilles et Anne. En pleine guerre d'Algérie, sa paternité lui vaut de rester dans la région parisienne pendant son service militaire, comme archiviste au Centre du cinéma des armées (où il rencontre l'acteur Jean-Louis Trintignant).

Simulacres et simulation


Le développement du travail de Baudrillard, tout au long des années 1980, se dégage des théories axées sur la critique de l'économie des signes, au profit de considérations sur la médiation et la communication des masses. Bien qu'il ait maintenu un intérêt pour la sémiotique de Saussure et sa logique d'échange symbolique (sous l'influence de l'anthropologue Marcel Mauss) Baudrillard a de plus en plus tourné son attention vers les théories de Marshall McLuhan, développant des idées sur la façon dont la nature des relations sociales est déterminée par les formes de communication d'une société. De cette manière Baudrillard s'est placé au-delà de la sémiologie formelle de Saussure et de Roland Barthes pour considérer les implications des signes au travers de l'histoire, et constituer ainsi une sémiologie structurale.
De manière notoire, il soutient — dans le livre L’Échange symbolique et la mort — que les sociétés occidentales ont subi une « précession de simulacre ». La précession, selon Baudrillard, a pris la forme d'arrangement de simulacres, depuis l'ère de l'original, jusqu'à la contrefaçon et la copie produite mécaniquement (cf. Walter Benjamin: « L'œuvre d'art à l'ère de la reproductibilité technique »), à travers « le troisième ordre de simulacre » où la copie remplace l'original. Baudrillard distingue néanmoins le simulacre de la copie, en ce que la copie se réfère à l'original (une copie d'un tableau ne prend son sens qu'à l'égard du tableau original), tandis que le simulacre ne fait que simuler d'autres simulacres : toute notion d'une œuvre originale, d'un événement authentique, d'une réalité première a disparu, pour ne plus laisser la place qu'au jeu des simulacres. En ceci, Baudrillard rejoint l'analyse nietzschéenne de la vérité comme voile, et de la pudeur de la féminité, ensemble de voiles qui ne font que voiler d'autres voiles. Ôtez tous les voiles, et il ne reste plus rien.
Se référant à une fable de Borges écrite sous le nom de Suarez Miranda, remettant en cause aussi bien la notion classique de l'auteur, que celle de la chronologie nécessaire à toute histoire des idées (les nouvelles d'un auteur pouvant ainsi influencer un auteur antérieur), Baudrillard a affirmé que dans notre société actuelle, le simulacre avait remplacé l'original, comme dans une nouvelle de Borges, la carte de l'Empire se substituait au territoire lui-même. Baudrillard a éprouvé, en particulier dans les années 1990, ses théories à l'aune, non pas du réel puisque celui-ci a disparu, mais des événements médiatiques successifs. Ainsi, dans son livre La Guerre du Golfe n'a pas eu lieu, il écrit que le simulacre de la guerre a précédé le conflit réel. Bien qu'il ait été lourdement attaqué, aussi bien au sein du système universitaire français que par des auteurs se posant en défenseur de l'héritage des Lumières, l'analyse de Baudrillard n'annihile pas pour autant, malgré ses apparences, toute notion de réalité ou de politique. On a pu ainsi le qualifier d'« apolitique » voire de « réactionnaire ». Pourtant, il écrivait, dès Simulacres et simulation, que la simulation précède le réel, possédant ainsi une valeur productrice. En aucun cas cela signifie que ce que nous avons coutume d'appeler « le réel » ne possède plus aucune valeur et que Baudrillard se soit fourvoyé dans une sorte de nihilisme ou de cynisme conservateur. Sa réflexion sur le statut des singularités en est le témoin. Reprenant en partie la critique situationniste de l'urbanisme, il a pu prendre l'exemple des aménagements urbains qui prétendent ôter la possibilité même de la « délinquance » en modélisant le territoire et en effaçant tout lieu susceptible de fonctionner comme lieu public de rassemblement (bref, « la rue »).
En utilisant cette ligne du raisonnement, Baudrillard en vient à caractériser l'époque actuelle — en poursuivant et en modifiant radicalement la critique de l'idéologie de Ludwig Feuerbach et celle de la société du spectacle de Guy Debord — comme « hyper-réalité » où le vrai en vient à être effacé ou remplacé par les signes de son existence. Une telle affirmation — celle pour laquelle Baudrillard a le plus contribué et a été le plus lourdement critiqué — est typique des « stratégies fatales » consistant à formuler des théories sur le monde social, au-delà d'elles-mêmes, à travers le langage. Baudrillard a pu affirmer que ce qui était important, c'était de formuler des « théories intéressantes », et non pas vraies, ce qui a prêté l'occasion de plusieurs dénonciations de son supposé « cynisme ». Plutôt que de dire, par exemple, « notre hystérie autour de la pédophilie est telle que nous ne comprenons plus vraiment ce qu'est l'enfance », Baudrillard écrivait, dans The Dark Continent of Childhood (2002), que « l'enfant n'existe plus ». Goethe lui-même considérait l'enfance inaccessible et Nietzsche ne parlait pas d'un « retour aux Grecs », mais visait, par l'approche de la Grèce antique, une altérité radicale à laquelle nous pouvions nous confronter. De même plutôt que dire — comme Susan Sontag dans son livre Sur la photographie — que la notion de la réalité a été embrouillée par la profusion de ses images, Baudrillard en est venu à affirmer que : « le réel n'existe plus ». Ce faisant Baudrillard caractérisa, dans Le crime parfait, son défi philosophique comme n'étant plus la question de Leibniz « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?», mais plutôt : « Pourquoi y a-t-il rien plutôt que quelque chose ?»

source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Baudrillard#Simulacres_et_simulation



Jean Baudrillard, Simulacres et Simulation (note de lectura)

Hyperréel et imaginaire

Disneyland est un modèle parfait de tous les ordres de simulacres enchevêtrés. Par coïncidence, ce monde enfantin surgelé a été conçu par un homme qui attend sa résurrection cryogénisé à moins 180 degrés centigrades: Walt Disney.

Disneyland – digest de l’américan way of life, panégyrique des valeurs américaines, transposition idéalisée d’une réalité contradictoire. „Mais ceci cache autre chose et cette trame «idéologique» sert elle-même de couverture à une simulation de troisième ordre: Disneyland est là pour chacher que c’est le pays «réel» qui est Disneyland (un peu comme les prisons sont là pour cacher que c’est le social tout entier, dans son omniprésence banale, qui est carcéral).” (pp. 25-26) Disneyland n’est pas moins iréel que toute l’Amérique.

Disneyland n’est ni vrai ni faux, c’est une machine de dissuasion mise en scène pour régénérer la fiction du réel. Son imaginaire infantile veut cacher que la véritable infantilité est partout.

Disneyland n’est pas seul: Enchanted Village, Magic Mountain, Marine World sont construits selon la même logique. Centrales de l’imaginaire.

Disneyland est un espace de régénération de l’imaginaire, construit à la manière des usines de traitements de déchets. Il est „la première grande déjection toxique d’une civilisation hyperréelle” (p. 27)

Les gens ne se touchent plus, il font de la contactotérapie. Les gens ne marchent plus, il font du jogging.

L’idée de Marshall Sahlins – c’est l’économie de marché qui secrète la pénurie, et non du tout la nature.

„Peut-être cependant une catastrophe mentale, une implosion et une involution mentale sans précédent guettent-elles un système de ce genre, dont les signes visibles seraient cette obésité étrange, ou l’incroyable cohabitation des théories et des pratiques les plus bizarres, répondant à l’invraisemblable coalition du luxe, du ciel et du fric, à l’invraisemblable matérialisation luxueuse de la vie et aux contradictions introuvables.” (pp. 28-29)

pour consulter toute la note veuillez aller a ce liens : http://elkorg-projects.blogspot.com/2005/03/jean-baudrillard-simulacres-et.html

jais chercher a telecharger ce livre en pdf gratuitement (biensure) mais sans resultat si vous avez un liens merci de le partager .
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MessageSujet: Re: simulacre & simulation   simulacre & simulation I_icon_minitimeLun 10 Fév 2014 - 19:31

Comme tu l'as dit hier c'est le livre duquel Neo sort ses disquettes piratées eu début de Matrix...voici un petit texte qui parle de ça :

Simulacre et Lapin Blanc

Les Choix du Jour

A la huitième minute du premier Matrix, Thomas Anderson, le futur Néo, s'empare d'un livre dont il a creusé les pages, et qui lui sert à camoufler des logiciels piratés. Dans son geste, l'acteur Keanu Reeves prend bien soin de laisser le spectateur lire le titre de l'ouvrage : Simulacra and Simulation.
La disquette qu'il extrait de ce livre-coffre est immédiatement cédée au personnage de Choi qui attend sur le pas de la porte, et dont la fiancée possède, sur l'épaule, un tatouage de lapin blanc.

A la sortie en salle du premier Matrix, ces deux références littéraires, à savoir Jean Baudrillard et Lewis Carroll, n'avaient pas échappé aux amateurs disposant d'un certain bagage. Mais, à la lumière unique du premier film, ces références ne pouvaient en réalité être autre chose que de simples clins d'oeil thématiques, renvoyant astucieusement à la structure thématique de ce premier film (la simulation, le rêve) sans plus de conséquences par rapport à la nature des écrits de ces deux auteurs.

Avec les sortie consécutives d'Animatrix et de Matrix Reloaded, il devenait peu à peu évident que ces références littéraires (les plus explicites des oeuvres Matrix) dépassaient le simple clin d'oeil à l'égard des boulimiques de la culture, et s'affichaient en véritable note d'intention des auteurs du script, à savoir une base de travail, un outil selon lequel s'élaborait leur plan scénaristique, en bref une précieuse clé de décryptage analytique.

Rétrospectivement, on réalisait que les Wachowski, bien malins, avaient déjà pris soin, dans cette seule scène, de nous donner tous les détails propres à faciliter une compréhension alternative, c'est-à-dire qu'ils introduisaient un superbe malentendu entre ce qui serait donné à comprendre et ce qui serait effectivement compris, et nous proposeraient, à posteriori seulement, de contempler notre erreur.

Premier détail - amusant : le nom de l'interlocuteur du héros, interprété par Marc Gray, est Choi. Celui de sa fiancée française, interprétée par Ada Nicodemou, est Dujour, soit littéralement (et en français dans le texte, s'il vous plaît) " Choix du Jour ".
Au cas où l'on aurait douté de la nature plus que " simplement " référentielle de Baudrillard et de Carroll dans cette séquence, voici déjà une indication marquée et ironique de la part des auteurs.

NihilismeSecond détail - d'importance : Le livre de Baudrillard n'a pas été " creusé " au hasard par le héros, mais précisément derrière la page de garde du chapitre " Du Nihilisme ".

Troisième détail - structurel : La disquette extraite du " Nihilisme " est directement remise au couple Choi-Dujour, où se trouve le tatouage du lapin blanc. Il y a, cinématographiquement, une relation de cause à effet entre la citation de Baudrillard et celle de Carroll.

Quatrième détail - essentiel : Le lapin blanc, comme nous le verrons plus loin, n'est pas tant une invention d'écrivain qu'une invention de mathématicien recourant à la littérature pour prouver ses théories.

Simulacre

BaudrillardIl est vain de tenter de résumer l'oeuvre de Baudrillard en quelques lignes, mais on pourra ici au moins s'essayer à une définition des termes simulation et simulacre.
La simulation se veut l'expérience du réel à travers ce qui nous en est rapporté (soit l'essentiel de l'expérience du réel tel que la vit un sujet contemporain), le simulacre en étant la représentation figurée (l'objet, l'image). Selon Baudrillard, les sociétés se sont à ce point reposées sur ces simulations, se sont à ce point constituées sur la base de ces signes de la réalité, qu'elles en ont perdu le contact avec le monde réel. Le simulacre, d'abord reconnu comme représentation du réel, s'est vu multiplié, systématisé par l'avènement industriel, contribuant à brouiller les repères entre l'image et ce qu'elle représente (ce qu'elle simule), jusqu'à ce que, " dans la société post-moderne, le simulacre ne finisse par précéder et déterminer le réel. "

" Il ne s'agit plus d'imitation, ni de redoublement, ni même de parodie, mais d'une substitution au réel des signes du réel, c'est-à-dire d'une opération de dissuasion de tout processus réel par son double opératoire, machine signalétique métastable, programmatique, impeccable, qui offre tous les signes du réel et en court-circuite toutes les péripéties. " (Jean Baudrillard. Simulacres et Simulation - Galilée 1981)

Dans le chapitre " Du Nihilisme ", Baudrillard fait remarquer que, lorsque l'omnipotence de Dieu ne peut être ressentie qu'à travers l'icône qui le symbolise, l'icône religieux devient le substitut de l'idée de Dieu. Ainsi, le simulacre devient omnipotent dans la conscience humaine, et suggère chez le croyant l'idée qu'au fond, Dieu n'a jamais existé, que seul le simulacre existe.

Or, si le premier Matrix jonglait astucieusement avec l'idée de la simulation (en opposant un univers simulé à la réalité que découvre le héros), à aucun moment le concept de simulacre n'était pleinement abordé, encore moins le fameux " nihilisme " qui en découle.
Ceci occasionna de légitimes critiques, surtout en France, à l'encontre des prétentions du film, et sa manière de citer pompeusement des philosophes dont il ne retenait à priori que l'aspect gadget.
. à priori seulement. Car si d'aventure un critique considérait que la référence à Baudrillard avait parfaitement lieu d'être, s'il supposait que les scénaristes hollywoodiens à l'origine de ce blockbuster était des gens cultivés et peut-être plus intelligents que lui (chose impensable pour un lettré français) alors ce critique, ce spectateur cultivé et doté d'un minimum d'humilité aurait très certainement eu l'intuition du piège qui se profilait : à savoir que Matrix le film opèrait précisément comme un simulacre, que les signes, les conventions auquel il avait recours pour nous révéler une " vérité " (Neo découvre le monde réel) étaient les outils-même qui nous interdiraient de comprendre la " vérité " de l'oeuvre (il n'y a pas de monde réel).

A Hollywood, le terme " pitch " désigne le plus petit dénominateur commun d'un film, ce qui permet de le résumer en quelques mots, ce qui sert à présenter de façon économique le concept à des producteurs éventuels, et ce qui sert plus tard à la promotion du film vers le public.
Le pitch de Matrix, tel qu'il fut unanimement perçu à sa sortie était évident : " La libération de l'humanité, rendue esclave par les machines. " C'est ainsi que journaux, médias, spectateurs, se relayaient l'histoire du film. Et pourtant, à y regarder de près, aucun élément de la campagne marketing n'explicitait ce pitch, tel que cela se produit pourtant d'ordinaire. Les seules taglines (phrases d'accroche) qui accompagnèrent la sortie du film étaient, au choix, des affirmations d'ordre général " The fight for the Future begins ", des questions qui laissaient entendre une réponse " What is the Matrix ? " ou des affirmations qui invectivaient directement le public " The Matrix has YOU ".

Et si, à tout hasard, ce pitch, aussi absent de l'oeuvre qu'omniprésent dans l'esprit du public, était faux ?
Et s'il n'était que le fruit d'une représentation du réel (du film) totalement déconnectée du réel ?
Et si le simulacre avait effectivement fini par précéder et déterminer le réel ?

Lapin Blanc

Mais comment diable les auteurs d'un film auraient-ils pu, non pas tromper le spectateur sur le pitch réel, mais lui donner à voir l'évidence, tout en étant surs et certains qu'il comprenne quasiment l'inverse ?
Rappelons, au passage, que dans le cas de Matrix, derrière le mot " spectateur " il faut comprendre " plusieurs centaines de millions de spectateurs à travers le monde, des esprits les plus crédules aux plus vifs. "
Or, pourtant, la saga Matrix va être, comme prévu par les auteurs, unanimement mé-comprise jusque dans son pitch même, et ceci sans raccourci scénaristique, sans cacher les indices appropriés au spectateur (comme cela se fait régulièrement dans les films " à retournement de situation finale ", type Usual Suspects ou Sixième Sens) mais au contraire en lui offrant généreusement tous les outils qui lui permettraient de révéler la supercherie (références littéraires et cinématographiques en pagaille, dialogues et situations qui détaillent la manipulation, etc.).
L'exercice est diablement risqué. Et surtout, comment s'assurer qu'à aucun moment, une situation, un dialogue, une référence, une image, ne vienne faire tiquer le spectateur ?

Pour les Wachowski, il semblerait que la solution résidait entièrement dans un paradoxe : faire appel à l'intelligence du spectateur et sa capacité à décrypter les images.

Il est bon, avant d'aller plus loin, de rappeler une des spécificités du média cinématographique par rapport à la littérature :
L'action de lire nécessite plusieurs opérations de codage nerveux de l'information par le cerveau :
1/ voir des signes.
2/ décrypter ces signes en lettres.
3/ organiser ces lettres en mots.
4/ lier ces mots et percevoir dans leur interaction une phrase.
5/ interpréter le sens de la phrase. Et enfin, accessoirement,
6/ aller chercher dans son vécu une émotion liée à ce sens.
Il y a donc, en littérature, une quantité phénoménale d'opérations neuropsychiques intermédiaires entre la vision du texte et l'émotion qu'il provoque chez le sujet.
A l'inverse, au cinéma, la vision d'un train fonçant à toute allure vers le spectateur entraîne un réflexe immédiat de surprise ou de peur. Car il existe un lien intuitif entre l'image perçue et l'émotion appropriée, et ce réflexe intuitif précède toute opération de décodage complexe. Ainsi, s'il est tout à fait possible de décoder une image, ceci ne peut se faire qu'à posteriori, à la lumière et dans le sillage de l'émotion ressentie (on ne s'étonnera donc pas du fait que l'image soit vite devenue l'outil de propagande par excellence).

En tant que film, Matrix va donc opérer sur son public un lien d'abord et avant tout intuitif. Et la réflexion du spectateur ne pourra se faire qu'à la lumière de son intuition. Mais Matrix, comme nous le savons, met en scène un univers de simulation informatique, c'est à dire un univers de pure logique.
Quelles sont les interactions improbables, les malentendus complexes qui peuvent naître au croisement de la pure logique et de l'intelligence intuitive ?

Un des pères de la logique moderne, le Professeur Charles Lutwidge Dodgson, s'était déjà intéressé à ces questions au XIXème siècle.
Un de ses confrères, le Professeur George Boole, tentait d'étudier les mécanismes de la pensée. Les résultats des travaux de Boole allaient donner naissance à la logique binaire (base de l'intelligence artificielle), selon laquelle une proposition est soit vraie soit fausse, et formalise les moyens de déduire de ces propositions d'autres propositions.
Mais le Professeur Charles Lutwidge Dodgson partit dans une autre direction, en tentant de démontrer que l'on pouvait recréer un univers cohérent à partir d'une proposition fausse. Il allait découvrir, à terme, qu'un univers logique entièrement basé sur une proposition fausse était ressenti intuitivement comme cohérent, y compris par un esprit qui ignore tout de la complexité mathématique de cet univers. Ce lien inédit entre la plus pure logique et l'intuition, le Professeur Charles Lutwidge Dodgson allait l'explorer, durant son temps libre, en écrivant des ouvrages pour enfants, sous le pseudonyme de Lewis Carroll.
Ainsi, un siècle et demi plus tard, Alice au pays des Merveilles et A Travers le Miroir continuent de fasciner par leur univers, ressentis intuitivement comme cohérents malgré l'absurdité de leurs propositions. 1


Notes :
1 un des films récents à avoir le mieux utilisé cette méthode de logique intuitive est Le Voyage de Chihiro d'Hayao Miyazaki


Référence

Revenons maintenant à notre séquence initiale de Matrix.
Comme on le voit, en l'espace de quelques secondes et de deux références littéraires, la note d'intention des Wachowski, leur fameux " Choix du Jour ", aura été plutôt explicite. On pourrait le résumer ainsi :
Cher spectateur
(et plus spécialement le monsieur qui connaît Baudrillard et Carroll et qui se croit malin).
Dans ce film, il ne sera question que de simulation et de simulacre.
Toi, spectateur, portera ton attention sur le signifiant, en le confondant avec le signifié.
Guidé par ton intuition, tu te construiras toi-même un univers cohérent basé sur une proposition absurde, quand bien même nous te rappellerons constamment que tu te trouves dans un univers informatique, c'est-à-dire sous la dictature d'une logique binaire.

Lewis CarollLe spectateur le plus cultivé, le plus inquisiteur, se sera donc fait prendre au piège de la référence qu'il s'était plu à reconnaître. Il aura vu du Baudrillard dans l'idée d'un Neo qui découvre le monde réel derrière les apparences de la simulation. Il aura vu du Lewis Carroll dans l'image d'un Neo suivant le lapin blanc pour, plus tard, passer A travers le Miroir.
Mais à aucun moment, semble-t-il, il ne pouvait se détacher du concept de la référence pour considérer ce que cette référence impliquait réellement comme système déjà à l'oeuvre dans le film, et déjà à l'oeuvre sur lui en tant que spectateur.

Car la référence, dans le cas présent, jouait déjà le rôle d'un simulacre.

Rafik Djoumi

http://www.matrix-happening.net/note_d_intention/simulacre_et_lapin_blanc1.htm
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