Le mouvement parti d’Espagne et qui a gagné Wall Street sera présent samedi à la place des Nations et à la Paradeplatz. Un Genevois raconte pourquoi il faut protester en Suisse.

Les «indignés» suisses se donnent rendez-vous samedi à la place des Nations, à Genève. © Laurent Guiraud
Cinq mois après l’Espagne et trois semaines après Wall Street, la Suisse va-t-elle accueillir un mouvement d’«indignés»? Dans le cadre d’une action mondiale en lien avec celle se déroulant dans le quartier d’affaire new-yorkais, des manifestations pacifiques sont prévues dans le monde entier le samedi 15 octobre. Sur différents sites Internet, les «indignés» suisses se donnent rendez-vous sur la place des Nations, à Genève, ou à la Paradeplatz, à Zurich.

Parmi eux, Juan Carlos Hernandez. Ce photographe genevois connaît bien le mouvement. De nationalité suisse et espagnole, il s’est intéressé aux «indignés» ibériques avant de se retrouver par hasard avec ceux de New York. «J’ai été là-bas pour autre chose. J’ai commencé à prendre des photos du campement et, peu à peu, j’ai adhéré au mouvement.» En Suisse, une telle action est-elle justifiée? «Il y a plein de raisons de s’indigner chez nous aussi. La hausse des primes maladie, par exemple, ou encore ces banques comme UBS qui socialisent les dettes et privatisent le profit.»

Un mouvement apolitique
L’indignation vient également de sa situation économique actuelle. «J’estime être aussi une victime de la crise des subprimes, car, depuis, j’ai de la peine à trouver des mandats et j’ai perdu la moitié de mes revenus.» Il dit faire partie du groupe des «99%», référence aux révoltés américains dans un pays où 1% de la population détient 40% des richesses. Comme lui, des milliers de gens ne veulent pas payer pour un système auquel ils n’adhèrent pas. Ils se retrouvent pour beaucoup sur le site Internet «We are the 99%», qui permet à tout un chacun d’expliquer sa situation financière difficile.

Reste à savoir si le mouvement va prendre dans notre pays. Juan Carlos Hernandez se dit «sceptique». Il voit déjà des politiciens qui tentent de faire de la récupération alors que «cela doit venir du peuple, il n’y a pas de leaders. C’est un mouvement apolitique.»

«Et, en Suisse, enchaîne-t-il, c’est difficile de faire bouger les gens. De plus, je vois déjà des personnes qui se plaignent de la mauvaise organisation de la manifestation, du manque de programme. Mais, à New York, rien n’était organisé. Cela doit se faire d’une manière spontanée. Il s’agit d’une indignation personnelle, d’un ras-le-bol.» Sur le Web, des internautes s’offusquent, car il n’est pas clair si la manifestation genevoise débute à 13 h ou à 13 h 30. Le Suisse serait-il trop pointilleux pour s’indigner?

L’éditorial de Blaise Willa, rédacteur en chef adjoint

Des «indignés» en Suisse? Enfin!

Les «indignés» suisses se sont donc enfin donné rendez-vous. Ils défileront samedi prochain au cœur de la bête: Zurich, poumon financier de notre pays, et Genève, siège des organisations internationales. Enfin? Oui, enfin. Depuis l’émergence du mouvement des «Indignados», en Espagne, puis sa dissémination dans toute l’Europe et aux Etats-Unis, la Suisseest restée fidèle à elle-même: aphone et aussi placide qu’une grand-mère qui referme prestement les rideaux sur le cortège du 1er Mai.

Bien sûr, la Suisse n’a ni le taux de chômage de l’Espagne ni le déficit monstrueux de la Grèce. Zurich n’est pas Wall Street et aucun plan d’austérité ne paralyse encore notre pays.

Il n’empêche: les jeunes Suisses ont aujourd’hui les meilleures raisons de manifester dans un système qui les a méchamment oubliés. Les perspectives pour un premier emploi sont complètement bouchées, les logements sont le plus souvent introuvables, le surendettement sévit et les assurances les matraquent.

Et c’est sans comptertout le reste! Ces points noirs qui mobilisent maintenant l’Europe du haut en bas: finance mondiale détraquée, ras-le-bol des partis, droit des consommateurs spolié, enrichissement des riches et appauvrissement de la classe moyenne.

Ce ne sera peut-être pas Mai 68. Mais la mobilisation qui s’annonce aura un avantage de taille: donner à toute une génération d’abstentionnistes une petite idée de ce qu’on appelle l’engagement politique.

Source: http://www.lematin.ch

Français l'indignation est internationale, que devient notre pays de révolutionnaire, un pays de réactionnaire ?

FFL