Un discours du Professeur Stepen Schneider à l'Université de Louvain en 2007
( texte copié du site de l'Université)
Discours du Professeur Stephen Schneider
Merci Monsieur le Recteur,
Excellences, Sir Partha, Messieurs les professeurs Berger, van Ypersele, chers collègues de longue date, chers amis, chers invités déjà honorés, et, peut-être plus important encore, futurs honorés -- vous les étudiants qui avez dépensé tant d’énergie pour découvrir ce monde dans lequel vous aurez un rôle essentiel à jouer pour essayer de réparer les nombreux problèmes que les générations précédentes vous ont laissés.
Certains signes nous permettent toutefois de garder espoir. En effet, les problèmes mondiaux majeurs auxquels nous devons faire face tels que les conflits violents, le développement durable, la qualité de l’eau, les soins de santé, la protection de l’environnement et les changements climatiques ont souvent des solutions similaires fondées sur des principes d’efficacité, de respect de l’environnement et d’équité. Un autre élément joue en votre faveur : nombreux sont vos professeurs qui consacrent beaucoup d’énergie à relever les défis mondiaux en les abordant tels qu’ils sont, c’est-à-dire en les considérant dans toute leur richesse et complexité interdisciplinaires et non pas en adoptant la vision traditionnelle d’un monde constitué de disciplines multiples sans aucun lien les unes avec les autres. La démarche académique que je préconise pour résoudre la problématique liée à la population mondiale, aux ressources, à l’équité et à l’environnement repose sur une formule originale réunissant des compétences multidisciplinaires interconnectées.
Cette université a été fondée vers 1425, ce qui la classe clairement dans la « vieille Europe ». Contrairement à notre vice président futur retraité Dick Cheney, j’aime être associé à la Vieille Europe. Tout comme j’apprécie sa triple trappiste et sa gueuze lambic.
Mais je suis ici pour brasser des problèmes bien plus graves et vous parler de l’énergie politique et des programmes indispensables pour nous aider à sortir de cette problématique et à résoudre les problèmes interactifs, ce que l’on appelle le « développement durable ». Ainsi, j'accomplirai une mission fondamentale dans un peu moins de deux mois : participer à une réunion plénière en tant qu’auteur coordonnateur principal d’un chapitre du Rapport du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC). Cette réunion rassemblera plus de 300 délégués de quelque 100 pays pour une session de travail d’une semaine ayant pour but de finaliser et d’approuver mot à mot le résumé de notre rapport sur « Les impacts, l’adaptation et les vulnérabilités face aux changements climatiques » rédigé à l’attention des dirigeants.
Je voudrais expliquer une idée importante exposée dans ce chapitre.
La plupart d’entre vous avez des assurances santé, incendie, automobile – non pas parce qu’il y a une grande probabilité que vous ayez une maladie effroyable, un incendie ou un accident, mais parce que ces risques, si vous n’avez rien investi pour vous protéger, peuvent avoir des conséquences catastrophiques. Nous payons des montants importants pour nous assurer contre les risques, même pour des événements dont la probabilité n’est que de 1%. C’est ce qu’on appelle la gestion des risques et c’est une chose que nous faisons tous les jours. Pourtant, des voix s'élèveront à la réunion plénière du GIEC pour dire que tant que la science n’a pas démontré cette certitude objective à 99% , il est prématuré de discuter de politiques significatives et que le message premier devrait être de dire que l’incertitude persiste. Certains utilisent hors de leur contexte des éléments du débat scientifique qui servent les intérêts de leurs client ou partis pris idéologiques et comptent sur les médias pour donner un poids égal à ces quelques scientifiques typiquement motivés par des intérêts particuliers. Nous n’avons pas vraiment besoin de savoir que la probabilité que les glaciers du Groenland fondent et que le niveau de la mer s’élève d’un mètre par siècle au cours des prochains millénaires est de 98% alors que la probabilité que ces phénomènes surviennent est plus grande que celle d’être confrontés à un incendie pour lequel nous sommes tous assurés. Mais nous parlons ici du fondement de la vie de la planète et non pas d’une simple marchandise.
De plus, nous sommes confrontés à un grave dilemme : si les pays en voie de développement ne se voient pas imposer d’objectifs avant de nous rattraper au niveau des émissions par habitant, cela équivaudrait à quadrupler la quantité de dioxyde de carbone dans l’atmosphère au cours du 22e siècle et au-delà. Par ailleurs, George Bush père a soutenu à Rio en 1992 que le niveau de vie des Américains n’était pas négociable et dix ans plus tard son fils a maintenu le plus gros émetteur de CO2 de la planète à l’écart du protocole de Kyoto.
Le fait est qu’une tonne de CO2 émise à Pékin produit exactement le même effet sur l’atmosphère et l’écologie qu’une tonne émise à Boston ou à Bruxelles. Donc, pour protéger l’environnement de notre planète, toutes les nations doivent jouer le jeu et réduire leurs émissions. Cependant, du point de vue légitime de l’inégalité de la part de responsabilité historique des émissions et de la capacité à payer, tous les pays ne doivent pas nécessairement en faire les frais. La Conférence sur le Climat appelle cela « des responsabilités communes mais différenciées ».
Alors comment résoudre ce dilemme de faire participer tout le monde tout en reconnaissant les inégalités dans l’utilisation historique de l’atmosphère comme dépotoir gratuit pour nos rejets? C’est ici que l’intégration interdisciplinaire peut nous aider. Au lieu d’attendre de nombreuses décennies avant de mettre en œuvre des technologies efficaces, nous pourrions mettre au point des programmes permettant de les déployer infiniment plus vite que cela n’a été le cas dans le monde aujourd’hui développé. Ceci nécessitera de l’argent et des efforts, en d’autres mots de la coopération. Le Protocole de Kyoto, ce n’est pas seulement réduire les émissions. C’est surtout faire comprendre qu’il est nécessaire d’imaginer des systèmes de coopération sociale pour diminuer les émissions de façon significative, c’est-à-dire arriver à 50-60% en-dessous des valeurs actuelles pour le milieu du siècle et se rapprocher de zéro à la fin de celui-ci. La clé, c’est que tout le monde participe et nous devons imaginer des systèmes de compensation pour aider les plus pauvres, les déshérités ou historiquement défavorisés à passer le cap.
La bonne gouvernance en matière de durabilité repose sur deux choses : protéger notre environnement commun et le faire de manière équitable. Rien de cela n’est possible sans un esprit de coopération, qui n’est pas vraiment encouragé quand les plus gros émetteurs de CO2 par habitant comme l’Australie et les Etats-Unis ne ratifient pas le processus parce que ce dernier contrarie les industries qui financent les campagnes des plus hauts dignitaires du pays – mais finalement la courant pourrait s’inverser dans ces deux pays.
Les entités politiques du nouveau monde auraient quelques leçons à recevoir de la Vieille Europe sur la manière de gérer la gouvernance du bien commun et de répondre en même temps au besoin d’équité. Il n’est pas impossible de faire les deux, mais il faudra faire preuve de génie inventif pour modeler les solutions durables qui permettront à la jeune génération à laquelle se consacrent nos institutions d’enseignement, d’envisager son futur avec beaucoup plus d’optimisme qu’elle ne le ferait autrement.
Je voudrais terminer par une anecdote au sujet de ma propre université. Lorsque j’ai été recruté par l’université de Stanford en 1991, c’était le centième anniversaire de cette institution encore jeune. Les alumni et d’autres bien nantis étaient assis dans des tentes et écoutaient les discours et débats de VIP. A la fin, le modérateur demanda : « quels sont les cinq problèmes environnementaux les plus graves ? » Après que d’autres membres du panel aient mentionné le trou dans la couche d’ozone, le changement climatique, la gestion des déchets, la pollution de l’eau, la pollution de l’air, la disparition des espèces, la mauvaise gouvernance, les incitants pervers et ainsi de suite, il ne me restait plus rien d’important à dire. J’ai pourtant lâché : « les cinq problèmes environnementaux les plus graves sont l’ignorance, l’avidité, la mauvaise foi, le tribalisme et les vues à court terme ».
Nous voici maintenant 15 ans plus tard - avons-nous fait des progrès depuis lors ? Pour moi, la réponse est certainement « oui ». Les progrès accomplis pour élaborer des politiques sérieuses sont bien plus importants qu’il y a 15 ans, mais pourraient être encore plus significatifs. Apprendre en agissant et mettre en œuvre une coopération sociale sont à mon sens le travail d’une génération ou deux, nous sommes à peu près à mi chemin nous et devons accélérer le mouvement.
Merci beaucoup pour votre reconnaissance de notre travail, car il est pour nous essentiel de travailler ensemble à la mise en place de cette coalition de volontés visant à mettre en œuvre les solutions déjà connues et à en fabriquer de nouvelles encore meilleures pour parvenir à un développement durable. Nous espérons que vous contribuerez à en faire la priorité numéro UN de l’agenda mondial. Merci beaucoup pour l’honneur que vous m’avez fait.
| 5/02/2007 |
Son interlocuteur est un journaliste Phelim Mc Aleer dont voici une courte bio:
Phelim McAleer, né le 4 avril 1967, est un journaliste et réalisateur irlandais. Il a en particulier réalisé en 2006 Mine Your Own Business, un documentaire qui dénonce la face cachée du lobby environnementaliste.
De 2000 à 2003, il a été le correspondant du Financial Times en Roumanie et en Bulgarie. Il a également été le correspondant de The Economist dans la région. Auparavant, il avait travaillé pour divers médias irlandais.
Dans différents débats, il a souligné que l'écologie utilisée à des fins militantes n'était que junk science.
En 2008, il réalise avec son épouse Ann McElhinney Not Evil Just Wrong, un documentaire dans lequel il s'en prend à Al Gore et à ceux qui voudraient imposer une thèse « officielle » sur le réchauffement climatique, dénonçant le coût de cette idéologie pour tous. Stephen McIntyre, Patrick Moore, Fred Singer, Richard Lindzen ou James Hansen font partie des spécialistes de la question interviewés.
Source Wiki.