La très célèbre revue scientifique Popular Science, créée en 1872, a publié en octobre 1936 un article intitulé: "Comment la fin du monde arrivera"...Le pdf du magazine : http://eu.joliprint.com/api/rest/url/print?url=http%3A%2F%2Fowni.fr%2F2010%2F02%2F17%2Fles-magazines-sur-google-books-%25e2%2580%2593-l%25e2%2580%2599exemple-de-popular-science%2F&disposition=attachment
130 ans de fin du monde dans « Popular Science »Le magazine américain de vulgarisation scientifique « Popular Science », une sorte d’équivalent de notre « Science & vie », vient de mettre la totalité de ses archives en ligne en partenariat avec Google Book. Pour faire simple, cela correspond à la possibilité d’effectuer des recherches « full text » dans les près de 1 500 numéros parus à ce jour !
Les mots-clés « end of the world » donnent une vingtaine de résultats, très peu de bruit, et une frise chronologique, comme on dit maintenant en primaire, bien représentative du zeitgeist des périodes parcourues. Je vous propose donc un rapide voyage dans le temps et l’apocalypse de janvier 1891 à février 2009.
Janvier 1881PopSci, comme on ne l’appelle pas encore, est né depuis maintenant presque dix ans, il traite bien sûr, de vulgarisation scientifique (les typhons japonais), d’inventions (les moteurs domestiques), et de religion. La 1ère citation de « la fin du monde » apparait en effet dans un article sur le Sabbat du professeur John Tyndall, qui traite très doctement du jour de repos (normalement du vendredi soir au samedi) et du rôle du dimanche. « La fin du monde » est alors citée comme date de fin du jour du Seigneur.
Septembre 1892C’est toujours de religion dont il s’agit et du débat qui agita l’église à propos de la ‘sphéricité ’ de la Terre.
La citation de « La fin du monde » est elle-même une citation d’un autre livre.
Mars 1902La religion cède sa place aux sciences sociales, et le professeur W.G.Summer (de Yale) nous livre un article passionnant « Suicidal fanaticism in Russia » sur des sectes russes apocalyptiques qui pratique le suicide en dernier recours. « La fin du monde » est un des thèmes abordés, avec la guerre et le service militaire par une dénommée Vitalia, à la tête d’un de ces mouvements religieux.
Aout 1939Après un assez long bond dans le futur, nous voici en plein début de conflit planétaire. C’est le moment choisi pour le 1er véritable article sur la fin du monde. Intitulé « Comment le monde finira ? », il s’appui sur une exposition du Field planetarium du Franklin Institute de Philadephie pour passer en revue les hypothèses scientifiques apocalyptiques du moment : Réchauffement (déjà), collision (avec un météore), refroidissement ou explosion du à un rapprochement dramatique de la Lune. On remarquera les illustrations qui semblent sorties tout droit d’un fascicule des Témoins de Jehova et la conclusion qui évoque l’exode des terriens vers une autre planète en vaisseaux spatiaux.
Octobre 1946Sorte de copier/coller de l’article précédent, celui-ci aborde cette fois 5 scénarios catastrophes (réchauffement, glaciation, collision d’une étoile avec le soleil, collision de la Terre avec un NEO ou avec la Lune). L’exposition qui sert ici de prétexte est celle du Hayden Planétarium de New York et l’article s’attache également à présenter la machinerie mise au point par les showmen du planétarium pour rendre le spectacle spectaculaire et inoubliable, l’article est d’ailleurs titré « Ces machines qui « détruisent » la Terre ». On notera au passage que l’exposition inaugurée en 1939, avait été rangée dans les placards pendant la durée de la Seconde Guerre mondiale.
Juillet 1961« Vérités et mensonges sur la 3ème guerre mondiale », bienvenue en 1961, la guerre froide, la crise des missiles de Cuba, tout ça, tout ça. PopSci s’appuie cette fois-ci sur un livre « De la guerre thermonucléaire » écrit par Herman Kahn, un faucon de l’époque, mathématicien et conseiller scientifique du gouvernement américain. L’article transpire à chaque ligne la paranoïa et fait, rétrospectivement froid dans le dos. Extraits :
* War Game« Vous êtes le président des États-Unis, un de vos conseillers arrive dans votre bureau livide. Leningrad vient d’être rayé de la carte. Il semblerait que le missile vienne d’Allemagne de l’Oue. Accident ? Sabotage, Ruse soviétique ? Qui sait ?
L’ambassadeur russe est en ligne : la situation est intolérable, l’Europe doit se désarmer entièrement et se soumettre à la domination soviétique. Pareil pour l’Asie et l’Afrique. En 24 heures !
Pour prouver qu’ils ne bluffent pas, les Russes vont détruire Francfort et Rome.
Le téléphone sonne, Francfort et Rome n’existent plus.
Vous êtes le président, que faites-vous ? »
* Comment gagner une guerre atomique« Imaginez que nous soyons touchés par 500 grosses bombes (atomiques). C’est assez pour raser – détruire totalement – chacune de nos 53 plus grandes villes (de New York et sa banlieue jusqu’à New Britain Bristol dans le Connecticut). C’est notre pays A, il contient un tiers de la population totale, la moitié de nos richesses, plus de la moitié de nos usines et les trois quarts de notre industrie d’armement. Supposez tout cela anéanti.
Est-ce qu’un tel désastre signifierait obligatoirement la fin définitive des États-Unis d’Amérique ? Pas sur. Si notre pays A a disparu, notre pays B est toujours là : deux tiers de la population, la moitié de la richesse, presque la moitié des usines. Avec de la chance, le pays B peut reconstruire le pays A en 10 ans.
Vous n’y croyez pas. Pourtant, les Russes l’ont déjà fait. La Seconde Guerre mondiale a détruit l’équivalent du pays A russe, de 20 à 30 millions de personnes tuées, un tiers de la richesse nationale annihilée. Les Russes ont rebondi, en six ans leur PNB est revenu au niveau d’avant-guerre et il continue de grimper. »
Le chapeau de l’article précise « Vous serez peut-être violemment en désaccord avec le contenu de ce livre, de nombreux experts le sont (…), mais ses idées sont si brillamment fraiches, ses conclusions si impressionnantes que les éditeurs de Popular Science considèrent l’article suivant (…) comme l’un des plus importants que ce magazine n’ait jamais publié. »
Une chose est sure, les Russes n’avaient pas le monopole de la propagande
Aout 1962Plus pessimiste que l’article précédent, « Man’s last big blast » s’attache au problème de la course à la puissance des armements nucléaires. La bombe H a remplacée la bombe A, aussi bien chez les Russes que chez les Américains, et PopSci pense voir arriver à moyen terme les Doomsday bomb, des bombes capables de détruire la Terre entière. Le magazine se penche aussi bien sur les aspects scientifiques, comment de tels engins fonctionneraient que les implications géostratégiques.
Mai 1972Le sujet ne semble plus trop à la mode, car la fin du monde doit se contenter d’une petite brève, de plus complètement décalée, puisqu’elle annonce que le Centre National d’Information sur les Tremblements de Terre se sépare de son vieux globe terrestre qui lui servait pour localiser les séismes. LOL
Juillet 1997Il faut attendre la veille du nouveau millénaire, pour voir resurgir une occurrence de « la fin du monde », est la encore, il s’agit d’une escroquerie, car l’article parle en fait de la fin de l’univers tel que le planifie deux astrophysiciens, Fred Adams et Greg Laughlin.
Mai 2004Gros dossier sur « Hollywood, la science et la fin du monde » grâce à l’incontournable Roland Emmerich et au « Jour d’après ». Dans un article très travaillé, le journaliste confronte les thèses du film au point de vue d’experts. Robert Alley professeur de géoscience à Penn state, Peter Ward Paléontologue, professeur des sciences de la Terre et de l’espace à l’université de Washington et Peter Schwartz, prévisionniste, consultant pour le Pentagone.
Si les trois oracles se gaussent un peu du côté tape à l’œil du film, ils confirment également à 100 % les faits scientifiques derrière le scénario.
Aout 2004La fin du monde est bien citée, mais très brièvement lors d’une interview avec Arthur C. Clarke (2001, l’odyssée de l’espace). Celui-ci répond « Dans 20 ans » à chaque question du journaliste sur « quand arriveront, les ascenseurs spatiaux ou le tourisme interplanétaire ». « Quelle année ce sera ! Ah, mais nous la verrons peut-être pas, car la fin du monde risque d’arriver juste avant ».
Janvier 2008Un article sur la biodiversité, les chercheurs qui œuvrent pour la préserver et qui mentionne bien sûr le Svalbard Global Seed Vault
(littéralement Chambre forte mondiale de graines du Svalbard)
Octobre 2008Petit encadré sur la polémique « fin du monde » dans un long dossier sur le LHC.
Janvier 2009Et enfin, une fausse occurrence, puisque pour ce dernier article « the end of the world » signifie ici le bout du monde, en fait, le pôle Nord.
Voila, fin du voyage, j’avoue être impatient de pouvoir faire une telle recherche dans le « Time » magazine ou « Newsweek ».
Source : http://www.la-fin-du-monde.fr/2010/03/130-ans-de-fin-du-monde-dans-%C2%AB-popular-science-%C2%BB/