Petite promenade Athénienne


Chers lecteurs,

Je vous écris depuis Athènes, où je suis venu voir la crise de plus près (vue de France, elle semble encore loin, mais ici on la touche du doigt). La France échappera-t-elle à ce que la Grèce se prend en pleine gueule ? J'ai mes doutes... Et quand ça arrivera, comment réagiront les Français, si sûrs d'eux, quand on leur annoncera des baisses de salaires d'une violence inouïe, des baisses des indemnités chômage, des augmentations d'impôts (humm, ça c'est déjà le cas), et toujours plus à venir. Et mieux : comment réagiront-ils quand ces belles annonces seront colportées par les représentants d'une "troïka", des étrangers ?

Hier, en regardant la télévision dans un salon où étaient présents les amis et la famille, bien que je ne comprenne pas le grec, voir Merkozy en conférence de presse expliquer en Français et en Allemand (avec des sous-titres grecs) que les Grecs doivent en gros crever la gueule ouverte, avait quelque chose de totalement irréel ! C'est Sarkozy qui annonce aux Grecs que leur salaire minimum va passer de 751€ bruts à 585€ bruts (soit environ 477€ nets, l'équivalent du RSA en France). Sachez en plus que jusqu'hier, les Grecs étaient exonérés d'impôts s'ils gagnaient moins que 12000€ par an. Désormais ce sera 5000€ ! Oui, 10% d'impôts si vous gagnez 5001€ par an !

Aujourd'hui je me suis promené toute la journée à Athènes : j'ai croisé 4 stations-service : 1 était fermée, et sur les 3 autres, le meilleur prix pour un litre de super 95 était 1,72€ ! En traversant la place Omoinia, en lieu et place du magasin Zara (qui trônait majestueusement il y a encore 2 ans), des rideaux de fer tirés couverts de tags servaient de décor à des SDF installés là depuis plusieurs mois. En continuant notre chemin, nous marchons sur une rue piétonne où des très jolies terrasses de cafés étaient jadis remplies, aujourd'hui vides. Nous croisons en pleine rue 2 drogués qui se piquent sans même se cacher. Quelques mètres plus loin, des policiers anti-émeutes se tiennent prêts pour intervenir au cas où... mais pas pour s'occuper des drogués, non plutôt d'insurgés qui ne sont jamais venus (il est vrai qu'il pleuvait et que les Grecs n'aiment pas l'eau).

En continuant, nous nous arrêtons à un petit carrefour où une rue entière était bloquée par un camion, qui ne pouvait avancer à cause d'une voiture mal garée. Ca klaxonne, personne ne vient. Les voitures s'accumulent derrière le camion, des gens s'arrêtent et se mettent à discuter. Tout cela devant 3 policiers anti-émeutes qui regardent depuis l'autre côté du carrefour. Le chauffeur du camion descend et s'approche de la voiture, énervé (c'est normal) et commence à essayer de la soulever. C'est à ce moment qu'un des policiers intervient pour lui parler, 3 minutes, puis fait demi-tour. Je demande à mon cousin ce qu'il a dit et il me traduit : il lui a dit "vous ne pouvez pas toucher à la voiture". Le chauffeur a répondu : "mais je fais quoi alors ?". Et la réponse du policier : "appelez la police". C'est là que mon cousin est intervenu et a demandé au policier : "mais vous êtes la police non ?". Et le policier de lui répondre qu'il faut appeler un autre service. Et mon cousin de lui demander : "mais pourquoi vous ne l'appelez pas vous ?". Là, le policier a fait demi-tour, est allé vers ses 2 autres collègues, et ils sont tous les 3 partis. Voici la scène que j'ai filmé (malheureusement, le policier est venu vers moi et m'a fait effacer la partie où il était présent. Poliment mais fermement). https://youtu.be/SpQTtAO6wEk. Finalement, après plusieurs tentatives infructueuses, un policier a fait reculer toutes les voitures, puis le camion, qui a pu ensuite s'échapper du guet-apens par une rue perpendiculaire. Quant à la voiture garée en plein milieu de la rue, elle n'a pas été inquiétée, et n'a pas reçu de PV.

Nous avons continué notre périple. toutes les rues sont pleines de voitures garées n'importe comment. Je me demande pourquoi le gouvernement préfère baisser les salaires, les retraites, augmenter les impôts, au lieu de commencer par verbaliser tous ces véhicules en infraction. Après tout, en la matière, la France est un bon exemple. En plus, ça rapporte, et c'est finalement assez juste : t'es mal garé, tu prends un PV ! Mais non, pas en Grèce. Je demande à mon cousin ce qu'il en pense. Sa réponse : "c'est la merde".

1 actif sur 4 en Grèce est un fonctionnaire : le gouvernement n'en a toujours pas viré un seul ! Ils laissent les gens se garer n'importe où. Ils augmentent les impôts de manière totalement absurde. Ils ne croisent aucun fichier, permettant à chacun de déclarer n'importe quoi et de tricher sans être inquiété. Si un politicien propose de croiser les fichiers pour mieux poursuivre les fraudeurs, les partis de gauche s'offusquent car c'est contre les libertés. Bref, la démagogie à son apogée, et la démocratie réellement en danger : Papandreou, dont le père était le grand ami de Mitterrand, est toujours le leader du parti socialiste grec, comme le fut son père, et son grand-père. Pour le parti de droite, Nouvelle Démocratie, c'est en gros pareil. La démocratie grecque est une dynastie de corrompus. Pour les mêmes causes, un dictateur tunisien a récemment dû s'enfuir et un dictateur syrien est en mauvaise posture... C'est effectivement la merde.