article de: Marc Mennessier
Mis à jour le 05/06/2012 à 15:09 | publié le 04/06/2012 à 19:04
FIGARO.FR
En l'an 775, la Terre a subi une brusque et puissante irradiation dont l'origine reste mystérieuse.
Des chercheurs japonais ont mis en évidence un bien étrange phénomène. En étudiant les cernes (ou anneaux de croissance) de tronc d'arbres fossiles, Fusa Miyake et ses collègues de l'Université de Nagoya ont découvert une forte et rapide hausse du taux de carbone 14, d'environ 1,2 %, correspondant aux années 774 et 775 de notre ère, qu'ils attribuent à un événement cosmique «extrêmement énergétique». Une telle augmentation est, en effet, «vingt fois supérieure aux variations attribuées aux changements de l'activité du Soleil», soulignent les chercheurs dans un article publié ce dimanche sur le site Internet de la revue britannique Nature.
Le carbone 14 est un isotope radioactif du carbone. Les archéologues l'utilisent couramment pour dater des fossiles animaux ou végétaux de moins de 50 000 ans. Il se forme naturellement lorsque les rayons cosmiques interagissent avec les atomes de l'atmosphère terrestre. Le phénomène à l'origine de ce pic de carbone 14 est cohérent avec les relevés, certes moins précis dans leur datation, déjà réalisés sur des arbres d'Amérique du Nord et d'Europe. Ces mesures font état d'une hausse du taux de carbone 14 d'environ 7,2 %, mais sur dix ans, de 775 à 785. Il ne s'agit donc pas d'un événement purement local.
«Pour avoir produit une telle quantité de carbone 14 dans l'atmosphère en 775, l'intensité des rayons cosmiques a dû considérablement augmenter», concluent les chercheurs qui avouent ne pas être en mesure «de préciser les causes de cet événement» hors norme.
Une chose est sûre: son origine ne peut être liée au cycle de l'activité solaire. La durée moyenne de ce cycle est de onze ans et son impact sur les variations du carbone 14 est quatre fois moindre (environ 0,3 %) que celle décelée dans les anneaux des deux spécimens de cèdre du Japon (Cryptomeria japonica) analysés par les chercheurs nippons.
«Seuls deux phénomènes connus pourraient changer l'intensité des rayons cosmiques en l'espace d'une seule année: l'explosion d'une supernova ou une tempête de protons» émise lors d'une éruption solaire massive, écrivent-ils. Mais aucune des deux explications n'est satisfaisante: une supernova survenue à proximité de la Terre en 775 serait encore détectable aujourd'hui, or ce n'est pas le cas. Enfin, notre Soleil n'a pas généré de «superéruptions» depuis au moins deux mille ans.