Deux avocats Albertvillois : Michel Jugnet et Nicolas Paradan,
Deux avocats Chambérien : Laurent Pascal et Sarah Pozzallo,
Deux avocats Grenoblois : Bernard Ripert, Emmanuel Auvergne-Rey,
viennent de créer "l'association d'avocats pénalistes solidaires".
Leur objectif commun :
OPPOSER à une justice TROP REPRESSIVE une DEFENSE OFENSIVE.
Rencontre avec Michel Jugnet l'un des fondateurs.
Qu'il s'exprime en audience, à son cabinet ou dans la vie, les propos vitupérants de Michel Jugnet viennent rapidement toucher au sensible, s'arc-bouter contre les injustices de ce monde. Un credo, un positionnement politique qui l'anime jusqu'au coeur de sa profession d'avocat.
« Tout a commencé avec les poursuites contre Bernard Ripert... », rappelle l'avocat du barreau d'Albertville . pour mémoire, Bernard Ripert est un avocat Grenoblois qui avait été poursuivi (et relaxé des poursuites) pour des propos outrageants aux Assises de Chambéry.
« Un comité de soutien s'est formé et on a commencé à se rendre compte que la défense des gens était de plus en plus en danger. »
Danger que l'avocat démontre en parlant des prisons : « elles sont pleines pour des raisons politiques ! Une politique d'exclusion systématique de tout ce qui n'est pas dans la norme. Le législateur aux ordres vote des lois de plus en plus répressives ! » Il enchaîne avec le constat général : « L'application de la loi se fait sans recul, ni scrupule...
Les juridictions, au lieu d'être les serviteurs du peuple deviennent des serviteurs du pouvoir !
» C'est face à cette situation que lui et ses collègues, ont engagé une longue réflexion et décidé d'agir non plus tous seuls mais solidairement. « Face à ça, seul, on était démuni. ce qui nous a amenés à la création de cette association. Dont le but est d'opposer une défense qui ne soit pas couchée mais offensive. »
Vision politique
de la justice
Ses mots pèsent, l'engagement n'est plus seulement sur le terrain de la pratique du métier, de la maîtrise technique et juridique, ensemble ils ont posé un acte politique. « La justice a nécessairement un sens politique. la vie des citoyens est complètement touchée par la justice. plus on a une justice répressive plus on a une société répressive. Les magistrats ont un rôle éminemment politique.
Tous les jours on constate que l'indépendance de la justice ce n'est plus vrai ! »
Techniquement, sur les dossiers, ces avocats innovants, l'association solidaire pourrait bien être une première, prônent la force collective.
« On va avoir une réflexion collective sur le rendu de la justice et à la fois sur les dossiers. On va échanger, joindre nos compétences. S'il y a quelque chose que je ne sais pas faire, quelqu'un va venir m'aider, dans un échange de techniques. » Si association il y a, l'un et l'autre ne sont pas des béotiens, et ils ont encadré son fonctionnement par une charte.
« Qui stipule que nous engageons une défense plus offensive et que nous demanderons des honoraires en adéquation avec ce que l'on pense. La solidarité est la base de notre relation et on ne prendra donc pas d'honoraires démesurés. S'il le faut nous saurons intervenir gratuitement.
» De propos très critiques dans le cours d'une plaidoirie pour la défense d'un client, dont Michel Jugnet sait sans doute les limites de l'efficacité, sans doute autant pour sa cause que pour celle de son client, d'un acte individuel lui et ses collègues ont mis en application le principe simple qu'à plusieurs on est plus fort, on a plus d'idées, de pertinence et d'impact. Cette détermination a-t-elle déjà eu des impacts directs, enregistré des réussites à la défense de dossiers ? « Aux assises, on voit bien que les gens sont broyés par la machine judiciaire. Si on veut arriver à sortir nos clients de là on n'a plus le choix, il faut être solidaire. Et on a déjà plaidé à plusieurs à Annecy et Chambéry.
Les magistrats commencent à se poser des questions, nos méthodes les interpellent. On a eu un résultat positif à Annecy où on a obtenu, et ce n'est pas la moindre des victoires au tribunal annécien où la rigueur est massive, une réduction de peine. » Opposer une vraie défense « On veut interpeller les magistrats sur ce qu'ils font et comment ils le font. » Michel Jugnet sait sans illusion être dans la peau de David face à Goliath, une lutte souvent inégale, mais les atteintes portées à la justice de son pays, à la défense de tout citoyen, le font sortir de ses gonds. « L'indépendance du juge est une fiction totale. Tout est fait dans ce système pour évincer l'avocat.
La seule façon de s'en sortir est d'imposer une vraie défense. On ne veut plus subir la justice et son fonctionnement... » Son dysfonctionnement ? Michel Jugnet appelle d'autres de ses collègues à les rejoindre. « On voudrait bien d'autres avocats dans l'association. il faut qu'ils acceptent de partager la même vision des choses. » Un état d'esprit qui, dans le labyrinthe judiciaire, dans l'emballement des textes de lois et réformes, face aux coups portés aux services publics pourrait redonner du sens et des valeurs à une justice que de plus en plus de citoyens dénigrent et vouent aux gémonies de l'injustice.
L.M.
Source Journal La Savoie http://www.lasavoie.fr/Actualite/Albertville/2010/06/25/article_le_legislateur_aux_ordres_vote_des_lois.shtml