Nous méritons de faire faillite. Oui, nous, l’Union européenne, la zone euro, la France. Nous le méritons, même si franchement je n’ai aucune envie de voir une telle chose se produire.
Mais nous le méritons. Nous avons des dirigeants absurdes. Des menteurs. Regardez les résultats des derniers stress tests bancaires.
Mensonge 1 : les banques européennes sont en bonne santé
Nous savions déjà que la méthode était discutable – ne pas prendre en compte les conséquences de la faillite d’un Etat sur la solidité des banques européennes alors que c’est justement le problème n°1 auquel nous sommes confrontés en ce moment.
20 banques devaient être recalées – sur 99 testées. Mais ce ne sont que 9 malheureuses petites banques qui échouent à cette mascarade de stress tests : 1 banque autrichienne, 1 allemande, 2 grecques et 5 espagnoles. Et encore, elles n’auraient besoin « que » de 2,5 milliards d’euros supplémentaires pour être hors de danger.
C’est un mensonge, tout simplement. Un mensonge parfaitement organisé et pensé par les autorités européennes. Les banques européennes ont dans leurs coffres pour environ 100 milliards d’euros de dettes grecques, portugaises et espagnoles.
Qu’avons-nous à gagner à une telle forfaiture ? Absolument rien, car personne n’est dupe.
Ce que les dirigeants de la zone euro veulent à tout prix cacher, c’est que la situation financière des banques européennes est telle qu’elles sont en fait maintenues en vie par la BCE.
La BCE joue le rôle de grand salvateur dans cette affaire. Elle soutient les banques grecques, espagnoles, irlandaises. Elle empêche le Portugal, l’Italie, l’Irlande, la Grèce et l’Espagne de faire défaut.
Au final comme nous vous l’expliquions lundi dans la Quotidienne, la BCE danse sur un volcan en éruption. Ses réserves et fonds propres ne représentent que 4,3% de ses actifs. Or ces actifs ne font pas rêver : de la dette des PIIGS, des créances pourries d’à peu près toutes les banques de la zone euro. Il suffirait que la valeur de ces actifs chute de 4,3% pour que la BCE soit en situation de faillite.
Combien faudra-t-il à votre avis pour que les dettes souveraines des pays périphériques de la zone euro perdent 4,3%, ou que les créances douteuses que les banques européennes ont confiées à la BCE s’effondrent ? Il y a de grandes chances pour que la BCE soit déjà en faillite.
Mensonge 2 : le problème grec pourra être résolu – et la zone euro sera maintenue
Si vous écoutiez l’interview de François Baroin ce matin sur France Info (écoutable ici), vous aviez l’impression qu’en fait tout allait bien. Alors certes, il y avait encore quelques – toutes petites – discussions entre les différents Etats européens sur les modalités d’aide à la Grèce, mais des broutilles.
Pour résumer l’intervention de notre ministre des Finances :
– la Grèce ne fera pas défaut
– les pays européens sont en grande partie d’accord sur ce qu’il faut faire pour aider la Grèce
– les banques seront volontaires pour participer à ce second plan d’aide à la Grèce
– la stabilité de l’euro sera maintenue
Et quant à savoir si les contribuables – en particulier français – allaient devoir payer pour la Grèce, notre ministre des Finances n’a tout simplement pas répondu.
Si c’était la résolution de la crise grecque était si simple, nous ne serions pas en train d’en discuter plus d’un an après. Ce qu’oublie de dire Monsieur Baroin, c’est que le problème ne se cantonne évidemment pas à la Grèce.
Imaginons que nous payons effectivement la facture grecque, aurons-nous les moyens – ne parlons pas de l’envie, elle n’est déjà pas très forte pour la Grèce – de sauver les autres pays en détresse financière ?
Les Européens peuvent s’agiter autant qu’ils veulent, se plaindre de l’excessive sévérité ou de l’injustice des agences de notation, la réalité est la suivante : la crise souveraine est contagieuse. Espagne, Portugal, Irlande, Italie… et bientôt, la France ?
Mensonge 3 : la France ne peut pas perdre son AAA
Car de plus en plus d’observateurs anglo-saxons soulignent la fragilité de la situation française.
C’est ce qu’explique mon collègue Matthew Lynn dans le dernier numéro de la version britannique de MoneyWeek. L’euro, qui devait favoriser les exportations tricolores, n’a en fait pas eu l’effet escompté sur notre économie.
La preuve, notre balance commerciale déficitaire. Comme le rappelle Le Monde, notre déficit commercial atteint des records : « Le déficit commercial de la France s’est encore creusé en mai, battant un nouveau record pour la troisième fois depuis le début de l’année, à 7,42 milliards d’euros contre 7,17 milliards en avril, en données corrigées des variations saisonnières, ont annoncé les Douanes jeudi 7 juillet ».
Le déficit de la France atteint 90% du PIB et devrait augmenter à 95% en 2012. Ce qui signifie que contrairement aux Italiens par exemple, au lieu de réduire notre endettement, nous l’augmentons.
Selon la Banque des règlements internationaux, la France est d’ailleurs le quatrième plus gros émetteur de dettes au monde (après les Etats-Unis, le Japon et l’Italie). Inquiétude supplémentaire, une grande partie de notre dette (37%) est détenue à l’étranger – ce qui est bien plus que pour l’Italie (24%), les Etats-Unis (19%) ou le Japon (1%).
Ces détenteurs étrangers – des fonds essentiellement – risquent d’être les premiers à paniquer en cas de menace sur la notation française et ainsi faire exploser le rendement des obligations françaises : c’est l’engrenage fatal que nous connaissons bien maintenant en Europe.
La conclusion de Matthew Lynn ? La France pourrait être le prochain domino européen à tomber, et le prochain pays à perdre son AAA. Le vacillement de la France a de grandes chances d’être fatal à la monnaie unique dont nous sommes pourtant les créateurs.
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