Une UTOPIE, diront certains ! une UTOPIE REALISTE, répondront d’autres.
En effet, dans un monde où les uns gèrent le superflu, alors que d’autres vivent dans la pauvreté et l’exclusion, un petit groupe d’hommes et de femmes ont décidé de réagir.
Leur ambition est très simple, elle découle du bon sens : ils veulent démontrer que nous vivons dans une société où règne l’abondance et où la rareté est une invention d’un système qui provoque le désir des « clients » pour les inciter à une consommation à outrance.
Ce pari est dans le domaine du possible à condition d’y croire, de faire, au lieu d’en parler. Ce pari se réalise avec celles et ceux qui se sentent motivés, intéressés, interpellés, par cette démarche, s’y associent, qu’ils soient riches ou pauvres : noirs, basanés ou blancs.
Il s’agit tout simplement d’amener des objets divers, utiles, en bon état, dont on n’a plus l’usage et qui peuvent servir à d’autres. Ces objets sont réceptionnés, inventoriés, stockés, mis sur le marché de la solidarité, c’est-à-dire distribués gratuitement à celles et ceux qui passent dans le Magasin pour Rien.
Les visiteurs peuvent emmener jusqu’à trois objets, sans rien apporter en contre-partie, sans rien payer. Ils n’ont pas besoin de se justifier, de prouver qu’ils vivent sous le seuil de pauvreté : ce seront des pauvres, des moins pauvres, des plus riches… Il n’y a pas de tricheurs. On ne dit plus (en parlant des précaires) « ils bouffent à tous les râteliers » car les râteliers sont ouverts à tout le monde. À terme, cela nous donnera peut-être l’occasion de constater que sur cette terre, on peut, si on veut : vivre ensemble, apprendre à nous enrichir de nos diversités.
Ceci étant précisé, rien n’empêche celles et ceux qui en ont les moyens, de mettre une pièce, un billet dans une « cagnotte solidaire », pour faire face aux frais de location du local et aux menus frais de fonctionnement. Cela n’est pas une obligation, mais une possibilité qui reste ouverte.
A la lecture de ce qui précède, certains vont s’écrier « c’est hallucinant, irréaliste, illogique ! la gratuité n’existe pas ! » et… les plus réalistes rajouteront : « chaque objet a une juste valeur !! » paroles de toute sagesse, qui nous ont amenés à accepter que les 358 personnes les plus riches du monde possèdent autant que les 2,3 milliards les plus pauvres !!!
Voilà pourquoi les personnes qui sont à l’initiative de cette expérience ont dit NON ! En alsacien, on dit « jetza langts mer han jetz d’nasa voll » et en français, on dit aussi « ça suffit, on en a plein le nez ».
Nous refusons la charité où l’on se penche sur le malheur des autres.
Nous voulons nous mettre à la hauteur de l’autre, des autres, de tous les autres.
Nous voulons, à notre manière, créer du lien, car ne l’oublions pas, le lien est plus important que le bien.
Nous disons que l’utopie de la solidarité et du partage est possible, par le fait même que l’utopie de l’appât du gain, de l’accumulation existe.
Et c’est ainsi que tous ensemble, nous démontrerons à l’usage, à l’expérience, qu’au lieu de s’exciter à acheter pour vendre plus cher, quitte à perdre sa vie à force de vouloir la gagner, on peut apprendre à réutiliser, à recycler, à redistribuer.
Alors… chiche, faîtes un saut au Magasin pour Rien de Mulhouse !
Depuis son ouverture le 25 novembre 2009, vous y trouvez de la vaisselle, des bibelots, des peluches, mais également des livres, CD, vidéos… Les éléments électriques partent très vite, comptez sur votre bonne étoile ou passez régulièrement. [La place ne permettant pas de tout accueillir, les habits sont redirigés vers d'autres structures (Bouge ta galère, la Maison familiale du quartier...), les meubles vers SOS Meuble.] Comme prévu, le magasin a tendance à se remplir.
Ce sont entre 5 et 25 personnes par demi-journée qui passent. Beaucoup d’habitués reviennent régulièrement. Les personnes en difficulté financière ont connu le bon plan surtout par le bouche à oreille, les réseaux sociaux. Les gens en surplus surtout par les communications de la presse locale (journaux, radios, TV…).
Le magasin est tenu par une femme pleine d’humour, embauchée grâce à un contrat aidé de 20 heures par semaine, et grâce à quelques bénévoles qui prêtent main forte en cas de besoin.
Les vieux principes résistent encore un peu – certaines personnes ont du mal à croire qu’elles peuvent venir les mains vides, que ce soit vraiment gratuit ; certaines se sont même fait prendre en train de voler, dans un magasin où tout est gratuit ! mais limité en nombre d’objets. « Vous voulez plus que 3 objets ? Si vous ne pouvez pas revenir demain, demandez moi gentiment, je vous autoriserai à en prendre aujourd’hui quelques-un en plus, toujours gratuitement ! » –, fraternité, solidarité et gratuité progressent !
Roger Winterhalter
2bis rue du Port
68100 Mulhouse
plan
03 89 42 04 32
03 86 33 97 86
Horaires d’ouverture (actualisés au 14/01/11) :
Mardi matin de 9h à 12h
Jeudi matin de 9h à 12h
Vendredi après-midi de 14h à 17h
http://www.lecolibri.org/2010/03/magasin-pour-rien-a-mulhouse/