La fuite de gaz de Total et notre fuite en avant
La fuite de gaz sur un site d'extraction de Total en mer du Nord fair resurgir le triste souvenir de l'explosion
de la plateforme Deepwater Horizon. Mais elle rappelle, aussi, que nos besoins en énergie sont insatiables.
La plate-forme Total Elgin, mer du Nord le 29 mars 2012 -
Total EP UK LtdLe parallèle est tellement frappant qu'il fait presque mal aux yeux.
Deux ans après l'explosion sur la plateforme pétrolière
Deepwater Horizon [le 20 avril 2010],
un nouvel incident aux similitudes dérangeantes se produit aujourd'hui en mer du Nord.
S'il s'agit cette fois-ci de gaz et non de pétrole,
la fuite située à 4 000 m de fond est tout aussi inaccessible que dans le cas de
Deepwater. Le groupe pétrolier est aussi dépourvu de secours et essaie de minimiser les risques,
tandis que l'ensemble des acteurs semblent impuissants.
Toutes les solutions envisagées aujourd'hui impliquent des conséquences dévastatrices,
car toutes nécessitent plusieurs mois de mise en place.
L'installation d'un tuyau de délestage permettant de régler le problème pourrait prendre jusqu'à six mois.
Une autre possibilité consisterait à simplement laisser le gaz s'échapper, autrement dit à ne rien faire.
Les activités d'extraction d'énergie sont de plus en plus risquées et coûteuses
et conduisent immanquablement à ce genre d'accident très grave.
Ces risques font partie des dommages collatéraux de nos sociétés fortement consommatrices d'énergie
au même titre que le catogan fait partie de l'identité de Karl Lagerfeld.
Après de brefs moratoires les incitant à la retenue,
les sociétés gazières et pétrolières reprennent de plus belle leurs activités en eau profonde.
En réalité, BP, Total et d'autres ont même intensifié leurs activités d'extraction en grande profondeur.
L'opinion publique devra "se faire à ces risques potentiels ou bien à renoncer à la voiture",
explique Amy Myers Jaffe, experte en énergie à l'université de Houston.
Et ceux qui n'ont pas de voiture alors ?
Aujourd'hui, on s'interroge sur l'origine de cette fuite. S'agit-il d'un défaut de cimenterie,
d'un problème dans le système d'aération, d'une conséquence de la corrosion,
d'un séisme sous-marin ou bien d'une négligence de Total ?
Toutes ces pistes passent à côté du seul vrai problème : la surconsommation d'énergie.
Nous nous sommes tellement enfoncés dans la vase que nous ne voyons plus d'alternative.
Pendant que ce nuage de gaz empeste le ciel, nous ne trouvons rien de mieux que d'étrangler l'énergie solaire.
[Allusion au choix du gouvernement Merkel de réduire les aides publiques à l'énergie solaire,
plan adopté au Bundestag le 30 mars en dépit d'une forte opposition.]
http://www.courrierinternational.com/article/2012/04/02/la-fuite-de-gaz-de-total-et-notre-fuite-en-avant