Chapitre premier
GÉNÈSE
Décembre 1999, fin d'année, fin de millénaire. Certains même annonçaient la fin du monde.
Et c'est aussi là, un peu plus au Sud, qu'un petit agité, émigré français de la ville lumière fraîchement débarqué en pays d'Oc, rencontra une bande de jeunes autochtones à la coiffure à l'irréprochabilité proportionnellement inverse à celle de leur moralité. Le Tintinmar avait laissé à la capitale ses bruyants camarades d'un groupe que l'on qualifiera de Punk puisque ça ne ressemblait à rien d'autre, si ce n'est à rien. Mais il avait emporté avec lui ses baguettes de bois, toujours prêtes à cogner. Alors à la peau de ses tambours de guerre s'allia l'acier, celui des quatres cordes de Niko, celui des poumons d'Abigail et d'Akli. Ne manquait à leur horde qu'une six-coups overdrivée, ce sera celle d'un nostalgique de ses tendres années électriques labellisées 80, soldat perdu correspondant local d'une brigade rojinegra parisienne. Le deal final entre ces jeunes gens et le gens un peu moins jeune se fera attablé au premier étage d'un restaurant de nourriture rapide, sans doute entraînés là par l'ingrate hérédité yankee de Abigail. Le recrutement du Bolchoï se clôtura donc par la signature du Nono, pour qui ce fut une bonne occasion de passer à autre chose que des journées assassinées à enrichir les producteurs de Gaillac perlé tout en reluquant de son balcon les jolies palestiniennes des barres d'Empalot.
Ce sera en janvier, dans un obscur studio souterrain, que se tramera le premier acte du complot de l'anti-France musicale.
En attendant, quelques uns iront goûter l'ivresse de la Belle Lutèce et de ses petites soeurs, se foutant royalement du flacon, d'autres prendront la poudre d'escampette option K-95 à Barcelone. L'apocalypse Do It Yourself.
Mais puisque certains annonçaient la fin du monde...
Chapitre second
CHAOS
Janvier 2000, début d'année, début de millénaire. Bref, début de pas grand-chose, continuité de tout, fin de rien. Et surtout pas de fin du monde, il a fallu faire avec.
Pas de fin du monde, mais ça n'empêcha pas nos cinq délinquants juvéniles et/ou séniles de se terrer, et pour longtemps, sous les rues de la ville, dans les dédales souterrains de bruyants studios de répétition.
Entre les quatres murs moquettés de bleu et constellés de pépites nasales, le groupe est à sa place et chacun est à son poste : Abi et Akli aux micros, Tintinmar aux tambours, Niko à la basse, Nono le Hool's à la guitare, la bière au goulot. Pour leur premier tapage vespéral ensemble, ils ont choisi du grand classique, un "My Way" skinhead, un "Louie Louie" sans cheveux : "Chaos" des 4-Skins, le texte translated en french by the Nono le Hool's. Les 3 heures d'occupation monnayée trépassent autour de la chanson des Prépuces. "Chaos" est le titre, "Chaos" est son interprétation. "Chaos" certes, mais pas "No Future". La machine est lancée, un downbound train sans chauffeur, et il semble bien dèjà que rien ne pourra l'arrêter. C'est l'histoire qui est en marche, la raïa ne pourra que rechausser les docs pour les semaines suivantes, et personne ne manquera car personne ne peut manquer. Personne ou presque : pour éviter que leurs voisins de studio n'accusent le Oi! band d'égorger d'innocents félidés durant les répétitions, Akli ne poursuivra pas l'expérience de chanteur, préférant dès lors jouer au poste de supporter d'abord à absynthe, ensuite à absence. Entre deux maux, on choisit le moindre : le gars Nono prendra, définitivement et par surprise, le "chant" masculin - de quoi utiliser sa salive à des activités autres que celle de tenter de rentrer dans le Panthéon des blagues Carambar. Mais ça sera aussi drôle…
Bolchoï : Violence rouge, colère noir
http://daimolytion.net/videos/908/bolchoi-violence-rouge-colere-noir-i-hk72