Lutte contre le Sida: "La PrEP réduit les risques de contamination de 86%" Qu'est-ce que la PrEP, ce traitement pré-exposition contre le VIH, et à qui s'adresse-t-elle? Coline Mey, chargée de mission Nouvelles Stratégies de Santé à Aides, répond aux questions de l'Express à l'occasion du Sidaction.
Plus d'un an après son arrivée en France, la prophylaxie pré-exposition (PrEP) a obtenu l'autorisation de mise sur le marché le 1er mars dernier. Utilisé par plus de 3000 personnes sur le territoire français, ce médicament antirétroviral protège du VIH comme le ferait un antipaludéen, c'est à dire qu'il s'agit d'un traitement préventif qui se prend avant un risque d'exposition au VIH.
Coline Mey est chargée de mission "Nouvelles Stratégies de Santé" à Aides. A l'occasion du Sidaction, elle revient sur le fonctionnement de ce traitement, le public ciblé, ainsi que le suivi médical strict qui doit l'entourer.
Comment fonctionne la PrEP?
La PrEP se prend sous forme de comprimés (le Truvada) et ne protège pas contre les infections sexuellement transmissibles (IST). Il ne prévient pas non plus d'une grossesse non désirée et nécessite donc pour les personnes concernées le recours à un moyen de contraception. La prise peut être quotidienne ou intermittente, selon le risque d'exposition et le profil de la personne. D'après les essais effectués jusqu'à présent, la réduction du risque de contracter le VIH observée est de 86 % avec le traitement, taux qui inclut également les personnes qui ne prenaient pas ou mal leurs comprimés.
Selon les personnes, le traitement a possiblement des effets secondaires (nausées, maux de tête, douleurs abdominales, diarrhées), surtout au cours des premières semaines, comme pour tout médicament. Mais de manière générale, il est assez bien toléré. De plus, la PrEP est délivrée dans le cadre d'un suivi médical plutôt strict, avant de commencer le traitement, puis régulièrement, avec notamment des dépistages VIH et IST, par la suite.
Attention à ne pas la confondre avec le traitement post-exposition (TPE) destiné aux personnes exposées à un risque au cours des dernières 48 heures.
A qui s'adresse le traitement et comment se le procurer?
Le traitement est destiné en priorité aux hommes gays et aux personnes trans qui ont des rapports sexuels avec des hommes, mais aussi à toutes les personnes les plus exposées au risque de contamination, aux travailleuses et travailleurs du sexe et aux personnes migrantes originaires de régions particulièrement touchées par le VIH -notamment l'Afrique saharienne.
Pour le moment, seuls les médecins expérimentés dans la prise en charge du VIH -donc soit dans les services hospitaliers en charge du VIH, soit dans les centres gratuits d'information de dépistage et de diagnostic (Cegidd)- peuvent prescrire la première ordonnance pour la PrEP [voir la liste des lieux où consulter pour obtenir la PrEP]. En revanche, depuis l'autorisation de mise sur le marché le 1er mars, il est possible de faire renouveler son ordonnance chez les médecins généralistes. Le traitement est entièrement remboursé par la sécurité sociale.
Combien de personnes ont recours à ce traitement pour le moment?
Actuellement, 3000 personnes -dont une très grande majorité d'hommes gays- ont recours à la PrEP en France. C'est une progression importante sur un temps court, mais nous espérons que de plus nombreuses personnes vont pouvoir en bénéficier. Il y a encore 6000 nouvelles contaminations en France, chaque année, dont une très large majorité au sein des populations les plus exposées au risque de contamination et identifiées dans les recommandation de prescription de la PrEP.
Nous souhaitons notamment toucher les autres publics les plus vulnérables par rapport au VIH, en particulier les personnes migrantes originaires d'Afrique sub-saharienne, mais aussi les personnes trans et les travailleuses du sexe.
Comment faire pour sensibiliser ces autres publics?
Des médecins s'organisent en lient étroit avec les associations pour rendre accessible la PrEP malgré les contraintes pratiques (absence de couverture sociale, mobilité, situation irrégulière, langue, besoins plus large en santé sexuelle et reproductive pour les femmes, etc). Des consultations spécifiquement orientées vers ces publics existent déjà en France et permettent de leur proposer une prise en charge adaptés.
L'important, pour toutes les personnes qui ont recours à cet outil de prévention, est aussi de pouvoir être accompagnées par les associations -notamment Aides- afin de gagner en autonomie et faciliter les interactions avec les médecins. Elles peuvent ainsi échanger dans un cadre respectueux et non jugeant avec d'autres personnes sous PrEP, et se familiariser avec cet outil et les autres stratégies de prévention disponibles.
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