Aux Pays-Bas, Big Brother utilise le GPS pour réduire CO2 et embouteillages
LE MONDE
Bruxelles CorrespondantBig Brother est néerlandais et travaille pour la bonne cause, celle de l'environnement : le système qu'il vient de mettre au point permettra, espère le gouvernement de La Haye, de diminuer dès 2012 les émissions de CO2 et de particules toxiques tout en réduisant les embouteillages, légendaires sur les autoroutes des Pays-Bas.
La formule miracle est appelée kilometerheffing ("taxation au kilomètre") des automobilistes. Elle a été dévoilée, vendredi 13 novembre, par le ministre des transports, Camiel Eurlings, figure montante du parti l'Appel chrétien-démocrate (CDA). Ce jeune responsable, qui offre son visage avenant au grand inquisiteur, a mis tout le monde d'accord, y compris lui-même puisque avant de devenir ministre, en 2007, il avait ferraillé contre les projets du Parti du travail visant à taxer les usagers en fonction de leur kilométrage.
SOUTIEN DES USAGERS
Il devrait en coûter, au début, à chaque automobiliste 3 euros par 100 kilomètres parcourus. Et 6,7 euros à partir de 2018. Le tarif devrait être modulé en fonction des routes empruntées et des différents moments de la journée - heures de pointe ou non. La taxation tiendra aussi compte du type de véhicule, avec un bonus pour les plus "propres". Les voitures seront toutes équipées d'un boîtier de type GPS, acquis grâce à une prime gouvernementale. Connecté à un satellite, le boîtier renverra ses informations (localisation, distance parcourue) à un centre de calcul, via des portiques de détection.
"Moins de files sur les routes et un meilleur environnement ! Cela semble impossible, mais c'est vraiment vrai", a expliqué M. Eurlings. Le ministre a annoncé que le nouveau mode de taxation se substituerait à tous les autres impôts frappant l'automobiliste néerlandais. C'est ce qui lui a permis de recueillir le soutien des groupements d'usagers. Selon le ministère des transports, 60 % des conducteurs devraient voir leur facture globale allégée grâce au nouvel outil. Les autres se consoleront en roulant sur des voies moins encombrées : "Les files seront réduites de moitié à l'horizon 2020", promettent les auteurs du projet.
Celui-ci devrait aussi, selon les calculs, faire baisser de 15 % le chiffre des kilomètres parcourus dans le royaume, chuter de 7 % le nombre de morts sur les routes et diminuer de 10 % les émissions de CO2 et de particules fines. Face à de telles promesses, seuls les populistes et les ultralibéraux osent se montrer critiques. Quant au parti écologiste, il se contente de demander que le projet entre plus vite en vigueur et aille plus loin.
A ce stade, quelques juristes seulement émettent des inquiétudes quant à l'utilisation des données collectées par les boîtiers embarqués à bord des voitures. "La facture détaillera les kilomètres parcourus et leur coût, pas les endroits où vous êtes allés", promet un porte-parole.
Le plan néerlandais est, à ce jour, le plus ambitieux au monde. Seul Singapour, jusqu'ici, a instauré la taxation au kilomètre. La Grande-Bretagne y a renoncé, se contentant d'un péage urbain à Londres. L'Allemagne, imitée par l'Autriche, taxe les poids lourds grâce à un système GPS. La mise au point de ce dernier s'est avérée très complexe, ce qui jette un doute sur les délais envisagés par les autorités néerlandaises.
Jean-Pierre Stroobants
Article paru dans l'édition du 17.11.09.
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