Planète Révélations
Bienvenu sur Planète Révélations, bonne visite à vous...
Planète Révélations
Bienvenu sur Planète Révélations, bonne visite à vous...
Planète Révélations
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Planète Révélations


 
AccueilRechercherDernières imagesS'enregistrerConnexion
-47%
Le deal à ne pas rater :
SteelSeries Apex 9 TKL – Clavier de jeu mécanique – Switchs ...
79.99 € 149.99 €
Voir le deal

Partagez
 

 La gerre des Dynasties ( Notes on T'ang Dynasty Sea Routes ) 1/1

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
xerox

xerox

Masculin Verseau Rat
Messages : 435
Date d'inscription : 23/02/2013
Age : 39

La gerre des Dynasties  ( Notes on T'ang Dynasty Sea Routes )    1/1 Empty
MessageSujet: La gerre des Dynasties ( Notes on T'ang Dynasty Sea Routes ) 1/1   La gerre des Dynasties  ( Notes on T'ang Dynasty Sea Routes )    1/1 I_icon_minitimeVen 8 Mar 2019 - 21:04

Société sous la dynastie Tang
Sauter à la navigation
Sauter à la recherche

La société chinoise sous la dynastie Tang (618-907) connaît de nombreuses évolutions liées aux changements politiques te économiques de la période. Cette dynastie est couramment divisée par les historiens en deux grandes phases : une première période, qui va de la fonction à la révolte d'An Lushan (618-755), durant laquelle l'empire est un État très centralisé, dirigé depuis Chang'an, sa capitale, par un gouvernement fort s'appuyant sur une « super-élite » servant comme aristocratie de fonction. Après la période de révolte, un basculement se produit, avec un recul de la centralisation et du contrôle de l’État sur la société et l'économique, l'apparition d'une nouvelle élite provinciale liée aux activités marchandes, financières et militaires, qui supplante peu à peu l'ancienne aristocratie, tandis qu'une expansion économique se fait sentir aussi bien dans l'agriculture, avec l'expansion de la riziculture et des cultures spéculatives, que dans les échanges qui s'intensifient, profitant plus aux régions méridionales.

Les textes et l'art de l'ère Tang fournissent une grande quantité d'informations sur la vie des Chinois durant cette dynastie. Provenant du milieu des élites lettrées, ils documentent surtout la vie de celles-ci, et plus particulièrement celles vivant à Chang'an, véritable mégapole médiévale, cosmopolite, marquée par la présence de nombreux centres d'études, de monastères, des marchés, mais aussi de tavernes et autres lupanars qui sont décrits comme des lieux de perditions pour jeunes lettrés provinciaux venus faire montre de leurs talents dans la capitale la « mégapole » servant de capitale à l'empire. La société chinoise de la période Tang reprend les bases posées par les périodes antérieures de la Chine médiévale, notamment la période de division, durant laquelle la société chinoise est dominées par une aristocratie militaire et administrative constituée de lignages revendiquant une grande longévité. L'élite des débuts des Tang est issue de ce groupe, constitué de personnages d'extraction souvent militaire, aux origines ethniques diverses (Han et peuples « Barbares » du Nord). Telle qu'elle fut décrite par les textes, la société était très attachée aux valeurs patriarcales, aux statuts sociaux, même si elle laissa plus de places aux femmes que les périodes ultérieures. Les plaisirs de la vie, en particulier l'alimentation raffinée et les différents divertissements firent l'objet de nombreux récits. La grande masse de la population est constituée par une paysannerie ayant peu d'autonomie économique, souvent attachée au domaine d'un puissant, travaillant dans une agriculture intensive avant tout dévouée à la céréaliculture, et organisée en familles nucléaires patriarcales. La société urbaine est quant à elle plus marquée par les activités commerciales et artisanales et la présence forte du pouvoir politique.

La période des Tang, avant tout durant sa seconde partie, connut d'importantes évolutions économiques affectant les évolutions sociales, comme l'essor de l'agriculture rizicole du Sud et de sa paysannerie nombreuse dédiée à des travaux intensifs, l'essor de la culture, du commerce et de la consommation du thé, l'émergence d'une nouvelle élite de commissionnaires et de marchands contrôlant les échanges, grâce à de nouvelles pratiques commerciales plus élaborées (comme la monnaie-papier), plus détachée du pouvoir politique. Ces phénomènes devaient s'affirmer avec force sous la dynastie Song.
Sommaire

1 Famille et parenté
2 Condition féminine et rapports de genre
3 Les élites sociales
4 Agriculture et monde rural
5 Commerce et moyens de transaction
6 Chang'an et les villes Tang
7 Alimentation, thé et nécessités
8 Loisirs
9 Les étrangers en Chine
10 Références
11 Bibliographie

Famille et parenté

La famille chinoise est de type patriarcal : c'est le père qui transmet à ses enfants un nom de famille (xing) symbolisant leur appartenance à leur famille et plus largement à leur clan, constitué de tous ceux portant le même nom et ayant un ancêtre masculin et une origine géographique identiques. Ces liens de parenté sont souvent très importants car ils sont un facteur de solidarités fortes (aides financières, partenariats et appuis professionnels, adoptions des orphelins du lignage, etc.), et sont symbolisés par le culte d'ancêtres communs. Dans ce contexte, les femmes ont une position plus extérieure à leur famille : épouses, elles sont originaires d'un autre clan ; filles, elles sont destinées à en rejoindre un autre et à intégrer ses liens de solidarités1.

L'acte constitutif d'une famille est le mariage. Il est généralement arrangé entre les deux familles, qui peuvent faire appel à une entremetteuse chargée de préparer les négociations. L'alliance a souvent une dimension économique, puisque la famille du marié verse un « prix de la mariée » à celle de la promise, souvent durement négocié. L'inflation de ces présents a suscité de nombreuses critiques à l'époque, accusant les parents de vendre leurs filles aux plus offrants. Le pire était quand une famille illustre mariait une de ses filles à un homme issu d'un lignage peu prestigieux mais enrichi récemment2. La suite des rites de mariage comprenait l'échange des coupes durant lequel les promis se rencontrent en principe pour la première fois, des échanges de présents de confirmation et enfin la cérémonie de mariage à proprement parler, fixée un jour propice au regard des horoscopes, durant laquelle les ancêtres familiaux sont également honorés3. Le couple ainsi formé était la base de la famille, mais pouvaient y être adjointes des épouses secondaires et des concubines. Les premières, qui intégraient la maisonnée après un mariage formel, avaient un statut plus confortable que les secondes, qui étaient souvent des esclaves achetées plutôt pour être des partenaires sexuelles de l'époux ; mais épouses secondaires et concubines étaient toujours placées sous l'autorité de l'épouse principale. Ces pratiques étaient encore réservées à cette époque au milieu des élites4,5.

Les enfants étaient attendus de l'union entre un homme et une femme. La raison de la venue d'une épouse secondaire ou d'une concubine était d'ailleurs souvent l'infertilité du couple, qui était imputée à l'épouse principale. Cette dernière était quoi qu'il en soit reconnue mère de tous les enfants de la maisonnée qu'elle dirigeait. D'autres fois on procédait à des adoptions, en général à l'intérieur du clan6. C'est à l'âge de sept ans que les garçons devaient idéalement préparer leurs études, du moins dans les milieux sociaux qui pouvaient se permettre ce qui était encore un luxe. On attendait que l'éducation forme avant tout une personne honnête, courtoise, garante de l'harmonie sociale. Il s'agissait en fait de former une personne à même d'assurer la continuité du lignage. Il en allait de même pour les couches sociales modestes, dans lesquelles les fils se formaient au métier de leur père, qu'ils secondaient avant de lui succéder à sa mort. L'entrée dans l'âge adulte se faisait pour les filles à quinze ans, et était symbolisée par le port des épingles de tête. Les garçons devaient attendre un peu plus, puisque c'était à vingt ans qu'on leur imposait le bonnet viril faisant d'eux des hommes. Ils pouvaient alors se marier pour fonder leur propre famille, même si dans les faits ils attendaient souvent quelques années de plus avant de le faire7. Ils n'étaient pas pour autant déliés des nécessités de la piété filiale (xiao), qu'ils se devaient de respecter jusqu'à la mort de leurs parents, qui leur imposait une longue période de deuil (trois ans en principe)8.
Condition féminine et rapports de genre
Beautés portant des fleurs, par Zhou Fang, VIIIe siècle.

Le cadre juridique de la famille décrit ci-dessus est éminemment défavorable aux femmes : elles sont soumises à l'autorité des hommes, ne jouent qu'un rôle secondaire dans la pérennité de leur lignage, leur sort est souvent réglé suivant des impératifs financiers et dans les familles élargies des relations inégalitaires étaient instituées entre épouse principale, épouses secondaires, concubines voire épouses du chef de familles et celles de ses enfants. Il n'empêche que la période Tang est souvent présentée comme plus favorable pour la condition féminine que d'autres époques de l'histoire de la Chine, notamment les suivantes qui ont vu sa détérioration9.

Il est courant de retenir de cette période l'importance politique de plusieurs impératrices et princesses : les impératrices Wu et Wei, la princesse guerrière Pingyang, la concubine Yang Guifei. Cette situation était en fait un héritage des dynasties du Nord de la période de division (420-581), fondées par des ethnies d'origine non-chinoise chez qui les femmes avaient traditionnellement une position sociale plus élevée, notamment dans les cercles des élites où elles servaient souvent de conseillères à leurs époux10. Dans les couches modestes, les femmes et les filles étaient traditionnellement responsables des tâches domestiques, ou leurs dérivées comme le tissage et l'élevage des vers à soie, pendant que les hommes avaient tendance à travailler dans les champs11.
Femme coiffée d'un chignon ample, VIIIe siècle.

Pour gagner une certaine autonomie, les femmes devaient s'extraire du moule traditionnel de la famille et du mariage. Nombreuses étaient celles qui gagnaient une certaine indépendance voire une autorité religieuse en entrant dans les ordres en tant que prêtresse taoïste ou bouddhiste12. Les maquerelles des maisons closes des quartiers chauds de Chang'an accumulaient quant à elles de grandes fortunes et beaucoup de pouvoir13. Les courtisanes de luxe étaient très respectées. Elles étaient connues pour leurs talents de chanteuse et poète, supervisaient les banquets et festins, connaissaient les règles des jeux de boisson et sont entraînées pour respecter les bonnes manières à table13. Elles sont un personnage caractéristique des nouvelles de l'époque ayant pour cadre la capitale. Bien qu'elles fussent connues pour leur comportement poli, les courtisanes étaient aussi réputées pour dominer les conversations avec les hommes de l'élite, et n'avaient pas peur de fustiger ou critiquer publiquement les invités qui parlaient trop ou trop fort, se vantaient trop de leur réussite ou ruinaient un repas par leur comportement grossier (une fois, une courtisane a même battu un ivrogne qui l'avait insulté)14. Alors qu'elles chantaient pour divertir les invités, les courtisanes ne faisaient pas que composer les paroles de leurs propres chansons, elles popularisaient une nouvelle forme de vers lyriques en mettant en musique des vers écrits par différents personnages connus de l'histoire de la Chine15. Les manuels de bonne conduite rédigés par des lettrés à destination des femmes qu'ils voulaient respectables (donc mariées) prescrivaient en général une conduite inverse : respect absolu et même adoration de l'époux qu'elles devaient considérer comme leur « Ciel », modestie, discrétion et retenue lors des réceptions et banquets16. Les nombreuses figurines féminines des tombes de la période montrent la vaste gamme d'activité que pouvaient exercer les femmes du milieu des élites et des courtisanes : musiciennes, danseuses, cavalières, joueuses de polo, jeux de société, etc. 17,18

L'apparence des femmes de la bonne société était très étudiée. Elles portaient une longue robe retenue par une ceinture-écharpe nouée par devant, laissant souvent apparaître un décolleté, signe de la relative liberté qui leur est laissée par rapport aux périodes postérieures, nettement plus prudes, et du fait qu'on appréciait alors les femmes rondes, aux formes prononcées. Cet ensemble pouvait être complété par une sorte de tablier porté par-dessus, une robe ample transparente quand elles sortaient, et une écharpe pour plus d'élégance19. Une loi est instaurée en 671 pour tenter de forcer les femmes à porter des chapeaux avec des voiles pour promouvoir la décence, mais elle est ignorée par certaines femmes qui commencent à ne porter que des capuchons voire aucun chapeau, mais également des vêtements et bottes d'équitation pour hommes, et des corsages à manches serrées20. La coiffure féminine à la mode consistait à porter un chignon ample, alors que les riches femmes portent d'extravagantes épingles de tête, peignes, colliers de perles, poudres de visage et parfums, ainsi qu'un maquillage très élaboré sur les sourcils, les joues et les lèvres21.

Le costume masculin était grossièrement similaire à celui des femmes, constitué également de la superposition de plusieurs robes amples. Le chignon masculin était moins large que celui des femmes, et la tête était couverte chez les adultes par le bonnet viril, dont l'aspect devait révéler le rang social de celui qui le portait. La barbe et les longues moustaches étaient à la mode, et on attendait d'un homme d'âge mur qu'il ait une consistance robuste22.
Les élites sociales

La dynastie Tang est caractérisée par l'existence d'une élite sociale, parfois désignée comme une « super-élite », constituée par un groupe limité de familles disposant des postes les plus importants dans l'administration. Leur prestige s'appuyait sur leur ancienneté, et la présence d'ancêtres remarquables dans le lignage, et des généalogies étaient constituées afin de renforcer la vénérabilité de la famille23. La situation est complexifiée par le fait que les familles en situation d'ascension sociale avaient depuis longtemps tendance à se forger une généalogie prestigieuse (jusqu'à la famille impériale qui prétendait descendre de Laozi et masquait ses origines en partie non-chinoises)24. En dehors d'un groupe limité de grandes familles attestées depuis longtemps, comme les Cui de Boling qui pouvaient se targuer d'avoir des ancêtres ayant assurément servi la dynastie Han, ou d'autres ayant servi les premières dynasties du Sud et du Nord, la plupart des familles de l'élite avaient émergé peu avant l'époque des Tang, notamment à l'époque des Zhou du Nord qui avait vu se constituer une élite politique à Chang'an dont les descendants occupèrent les postes les plus importants sous les Sui et aux débuts des Tang. Les autres grandes familles s'étaient ensuite établies à leur tour à Chang'an afin d'être plus proches du pouvoir et plus à même de réussir les examens impériaux, devenus un point de passage indispensable pour préserver leur influence, bien que l'appartenance à une famille dont certains membres occupaient déjà des postes importants offrait un accès direct à des postes de la fonction publique. Dans ce nouveau contexte, la base locale autour d'un domaine et d'un poste administratif provincial n'assurait au mieux qu'une position parmi l'élite provinciale et pas parmi la super-élite impériale, d'autant plus que les partages successoraux avaient tendance à diminuer la richesse des membres d'un lignage au fil du temps. Certains lignages comme les Li de Zhaojun, originaires de l'actuel Shandong où ils jouaient un rôle majeur depuis l'époque des dynasties du Nord, abandonnèrent complètement leur base provinciale. Ces familles maintenaient aussi leur prestige en contractant des alliances matrimoniales avec des lignages aussi éminents que le leur. Venaient ensuite un ensemble de familles d'extraction plus récente, les phénomènes d'ascension sociale étant toujours de mise, avec lesquelles les lignages anciens et le lignage impérial formaient l'élite sociale, ou l'« aristocratie » de fonction de l'empire25.

Le pouvoir impérial commandita à plusieurs reprises des ouvrages enregistrant les grandes familles de l'empire, dans lesquels on insistait plus sur les postes occupés au service des Tang plutôt que sur l'ancienneté du lignage : il y eut ainsi une volonté de lier complètement le prestige des grands lignages à l'exercice de fonctions pour le compte de l'empire26. Par ailleurs, les empereurs pouvaient renforcer la dignité d'un lignage en offrant à un de ses membres un titre honorifique repris des temps antiques, et en le promouvant à un rang social plus élevé. Certains postes administratifs jugés plus honorables, liés à des rituels, étaient désignés comme « purs » et confiés de façon préférentielle suivant un principe héréditaire à des membres de cette aristocratie de fonction. Il faut encore préciser que le système des examens, au-delà de l'importance accordée aux aïeux du candidat, n'était pas de nature à limiter la reproduction sociale car les membres des grandes familles avaient en général reçu une éducation lettrée très poussée dans les grandes écoles de la capitale (réservées aux membres des familles de plus haut rang) qui leur permettait de très bien y figurer, notamment parce que les examens valorisaient avant tout les qualités littéraires des candidats27.

Un phénomène important de la seconde moitié de l'époque des Tang est la disparition des grands lignages aristocratiques qui dominaient la société chinoise depuis l'époque de division. Ils furent progressivement supplantés par des lignages provinciaux qui s'étaient affirmés dans l'exercice de charges militaires, ou des missions d'administration les plus importantes (notamment fiscales), dont l'ascension sociale s'était faite en fonction de leurs capacités pratiques, et non de leur maîtrise des arcanes de la culture lettrée et des réseaux aristocratiques de la capitale28. Par ailleurs semble avoir émergé une élite locale dont les bases de la richesse et de la puissance ne dépendaient pas directement de l'exercice d'une fonction administrative, grâce à l'essor économique de la seconde moitié de l'ère Tang. Ce basculement s'effectua progressivement à partir de la période de la révolte d'An Lushan, mais s'accomplit semble-t-il surtout dans la période finale des Tang, le prestige des postes officiels de la capitale étant resté intact même après l'affaiblissement du pouvoir impérial. Un tournant majeur semble se produire dans la seconde moitié du IXe siècle durant la période de la révolte de Huang Chao, qui avait lui-même échoué aux examens impériaux et apparaît donc comme un laissé pour compte de l'organisation classique du système de préservation des élites, et éprouvait un fort ressentiment envers les hauts fonctionnaires de l'État qui furent nombreux à disparaître dans les purges de cette époque29.
Agriculture et monde rural

Les techniques agricoles avaient connu plusieurs progrès notables depuis la fin des Han, compilées dans les Principales techniques pour le bien-être du peuple (Qi Min Yao Shu) de Jia Sixie, sous les dynasties du Nord et du Sud, qui put être largement diffusé dans les campagnes grâce au développement de l'imprimerie. Parmi les évolutions essentielles, on peut citer la sélection de plus en plus poussée des graines, l'essor de la méthode de repiquage, l'utilisation accrue d'engrais (essentiellement du fumier, animal ou humain), la pratique de plus en plus courant de rotations des cultures, l'utilisation de modèles de charrues plus efficaces permettant de faire varier la profondeur des sillons ouverts par le soc et de herses, etc. Ces techniques se diffusèrent sous les Tang, participant à un essor agricole marqué. Le contrôle des eaux fut également amélioré, avec la construction de canaux, de digues et l'introduction d'instruments d'irrigation plus efficaces, en premier lieu la noria30. Du point de vue des plantes cultivées, les céréales continuaient à avoir la part belle : millet et blé au Nord, riz au Sud essentiellement, même si dans la seconde région les céréales caractéristiques du Nord se diffusèrent. Deux cultures de nature plus spéculative connurent un développement : le thé, produit surtout dans des régions du Sud (Zhejiang et Jiangsu), circulant sous la forme de briques de feuilles séchées et agglomérées et devenu un produit de consommation courante ; la canne à sucre est introduite en Chine à l'instigation de l'empereur Tang Taizong, et sa transformation en divers produits sucrés se répand dans les monastères bouddhistes à la fin de la dynastie, prélude à sa popularisation sous les Song31. Le coton en provenance de l'Inde commença lui aussi à être cultivé, mais c'est durant la dynastie Yuan qu'il devint la principale industrie textile en Chine32.

L'évolution de l'agriculture profita avant tout aux régions méridionales, où la riziculture sur champs inondés connut un important essor avec l'expansion de la technique du repiquage, la sélection d'espèces de plus fort rendement, l'adoption d'instruments agricoles adaptés aux conditions locales (les nouveaux modèles d'instruments aratoires étant plus adaptés aux reliefs de collines qui y étaient courants) et la possibilité de gagner des nouvelles terres agricoles sur des espaces incultes (défrichements sur des collines, assèchements de terres autour des lacs Tai et Dongting). Les riches régions agricoles du Sud (bassin de la Huai, Bas Yangzi et, de plus en plus, le Zhejiang) devinrent essentielles pour la production alimentaire de l'empire33,30.

Les structures agraires de la période Tang étaient fortement inégalitaires. Les premiers empereurs de la dynastie avaient pourtant repris à leur compte la politique des « champs égalitaires » (juntian) des dynasties du Nord qui les avaient précédées, visant à attribuer à des familles de paysans des terres publiques (en général incultes) à titre viager de façon à aboutir à un système agricole plus équitable et surtout dégager des revenus fiscaux. Dans les faits, cette politique ne fut sans doute appliquée que dans le Nord-Ouest (elle est attestée par les textes de Dunhuang), mais pas ou peu ailleurs34,35. Le pouvoir central ne remit pas en cause la prépondérance et l'expansion des grands domaines appartenant aux élites de la cour ou des provinces ainsi qu'aux monastères, qui souvent étaient exemptés de taxes. Il émit pourtant des décrets contre l'absorption par les grands propriétaires de champs (dépendant officiellement de l’État) détenus par des paysans, mais cela ne fut sans doute jamais appliqué. La pression fiscale et les incertitudes de la production agricole devaient pousser les paysans à se placer sous la coupe d'un grand propriétaire, a fortiori s'ils avaient contracté des dettes envers celui-ci. La « disparition » de ces paysans des terres dépendant de l’État greva ses ressources fiscales. Aussi des fonctionnaires recenseurs furent souvent dépêchés dans les campagnes pour les « retrouver » et les réinscrire sur les registres fiscaux ; en 723, un de ces serviteurs de l’État retrouva ainsi 800 000 paysans manquants, chiffre révélateur de la saignée que représentait alors le phénomène de fuite paysanne. Après la révolte d'An Lushan, la situation fut irréversible : le système des champs égalitaires avait disparu et la grande propriété privée de la terre dominait, servant les familles des élites de la capitale et des provinces36,37.

Les grands domaines privés étaient généralement désignés sous le terme de zhuang yuan (« ferme-jardin »). Ils couvraient de vastes surfaces, mais étaient rarement d'un seul tenant. C'était l'occasion de disposer de productions diversifiées : certaines parties étaient destinées à des cultures céréalières, d'autres à des plantations de type spéculatif. Un propriétaire terrien de richesse moyenne résidant à Suzhou, Lu Guimeng, possédait ainsi une petite ferme près de la ville pour produire des denrées de base, et plus loin un domaine d'exploitation sylvicole et encore plus loin une plantation de thé, ces deux derniers ayant manifestement une finalité marchande. Ces personnages jouaient ainsi un rôle notable dans le développement des cultures commerciales et également des méthodes agricoles38,39. Les paysans qui travaillaient ces terres pouvaient avoir le statut de fermier ou métayer, versant une part de la récolte avec le propriétaire. Ils étaient souvent des dépendants attachés à la terre de façon héréditaire. Les plus démunis relevaient de la catégorie des journaliers, soumis à des conditions plus précaires40,41.
Commerce et moyens de transaction
Le tracé du Grand Canal, avec les étapes de son creusement aux époques Sui et Tang.

Les réseaux commerciaux se densifièrent durant la période Tang. Le commerce d'échelle régionale connut un essor marqué, en partie impulsé par le Grand Canal, qui mettait en relations le Sud déjà très dynamique du point de vue commercial et le Nord qui l'était moins durant la période de division mais restait prépondérant du point de vue démographique et agricole. Plus largement, le transport fluvial fut un moteur essentiel du développement des échanges intérieurs, avec les progrès de la batellerie et de l'aménagement des voies navigables, notamment avec la construction d'écluses de plus en plus élaborées pour franchir les passages les plus difficiles. En conséquence, des produits pouvaient traverser l'empire en étant transbordé entre les différentes artères navigables qui le traversaient. Des convois d'environ trois mille bateaux parcouraient le Grand Canal pour approvisionner les capitales42,43. Deux bateaux destinés au transport fluvial datés de l'époque Tang ont été exhumés dans le Jiangsu, à Rugao et Yangzhou, deux importants centres d'échanges ; ce qu'il en restait lors de leurs fouilles mesurait respectivement environ 17 et 18 mètres, et ils étaient divisés en plusieurs compartiments étanches, suivant une méthode qui se diffusait alors44.

Le développement commercial profita aux villes, dont les marchés locaux se développèrent. Avec l'affaiblissement de l'autorité étatique après la révolte d'An Lushan, des marchés et boutiques proliférèrent en dehors de la vigilance des fonctionnaires. Les propriétaires des grands domaines privés ou religieux, ainsi que bien d'autres acteurs comme des soldats ouvrirent de plus en plus de points de vente. Ce qui accompagna la croissance marquée des grandes villes provinciales, en particulier dans le Sud où les villes côtières profitaient également de l'expansion du commerce maritime en direction de l'Asie du Sud-Est45. Dans le milieu rural, les bourgs bénéficièrent également de cette dynamique. Des marchés périodiques furent créés sur les routes commerciales en pleine campagne, ou à proximité de grands domaines. Les fêtes religieuses étaient notamment l'occasion de sortes de foires. Les généraux du Nord initièrent également de tels marchés à proximité de leurs garnisons46. Les campagnes étant mieux connectées aux réseaux commerciaux et pouvant profiter de l'émergence d'un marché urbain important aux goûts diversifiés, les productions agricoles se spécialisèrent de plus en plus, dans une vocation commerciale et spéculative. Cela concerna notamment la culture du thé, des fruits, du bois de chantier et plus tard la canne à sucre47. La seconde partie de la dynastie Tang vit ainsi le développement d'un entreprenariat privé à plus grande échelle48.
Pièce de monnaie de la dynastie Tang, Kai Yuan Tong Bao (開元通寶), frappée pour la première fois en 621 à Chang'an49

L’État conservait le contrôle des échanges de certaines denrées, notamment les prix des céréales, régulés par des greniers publics. La pratique des monopoles instituée par les Han fut reprise et réformée après la révolte d'An Lushan. Cela concernait en premier lieu le sel, le thé et l'alcool. Ils ne pouvaient être commercialisés que par des marchands dûment mandatés par le gouvernement50. Ces monopoles, cumulés aux taxes commerciales, fournirent la majeure partie des revenus fiscaux après les années 770. Les marchands servant d'intermédiaires pour l'administration purent amasser des richesses considérables grâce au commerce du thé et du sel. Devant manier de grandes sommes de monnaie, ils développèrent des instruments de transfert de crédit. Apparut ainsi la « monnaie volante » (feiqian) : le gouvernement central délivrait un papier valant pour reconnaissance de dette à un marchand qui lui avait vendu des cargaisons de produits sous monopole dans la capitale, et grâce à ce papier cet intermédiaire pouvait retirer les espèces auprès du trésor public de sa province d'origine, s'évitant ainsi de transporter des sommes trop importantes. Vers la fin des Tang, ce type d'instrument de crédit se développa dans le cadre des échanges strictement privés : des prêteurs et changeurs constituèrent des entrepôts où ils entreposaient de la monnaie ou d'autres biens de valeur contre des certificats de dette fonctionnant comme des billets de banque51,52,53.

Les acteurs du commerce privé furent par ailleurs de mieux en mieux organisés. Les riches marchands constituèrent de véritables firmes commerciales, investissant dans des entreprises de plus en plus onéreuses et constituant des partenariats commerciaux. Les gérants des entrepôts les plus importants et de l'organisation des convois fluviaux étaient également des figures majeures du développement commercial de la période tardive des Tang. Ce commerce atteignit sa pleine maturité sous les Song54.
Chang'an et les villes Tang
La petite pagode de l'oie sauvage, VIIIe siècle, Xi'an.
Plan schématique de Chang'an sous la dynastie Tang.
La porte Danfeng, au sud du Palais de la Grande Clarté (Daming), après sa reconstruction achevée en 2003, Xi'an.
Article détaillé : Chang'an.

Chang'an, l'actuelle Xi'an, a déjà été capitale sous les précédentes dynasties Han et Jin. Elle est reconstruite ex nihilo vers 600 par Wendi des Sui, et les souverains Tang ont poursuivi cet effort55. Son organisation suit celle des capitales chinoises antérieures. Elle a la forme d'un vaste rectangle d'environ 8,6 km d'axe nord-sud et environ 9,5 km d'axe est-ouest ceinturé par une muraille en terre damée, ouverte par douze portes. Elle est dominée par deux cités intérieures disposées au nord : le palais impérial, adossé au rempart, où réside l'empereur en temps normal, et la cité impériale qui le borde au sud, où se trouve l'administration centrale. Un autre palais, le Palais de la Grande Clarté, se trouve au nord-est de cet ensemble, bâti lui aussi contre les murailles mais vers l'extérieur. C'est le secteur de la ville de l'époque Tang qui a le plus fait l'objet de fouilles archéologiques car il a été épargné par l'urbanisme des périodes postérieures, et une de ses portes a même été reconstruite suivant les reconstitutions des spécialistes de l'architecture de la période. La ville est organisée autour de rues formant un quadrillage régulier, 11 d'axe nord-sud et 14 d'axe est-ouest, la divisant en 108 quartiers ceints par leurs propres murs. Ces unités avaient leur propre administration, avec un responsable chargé de superviser la fermeture de leurs portes chaque nuit, et sont souvent consacrés à une activité spécifique. Deux secteurs plus vastes étaient des marchés, un à l'Ouest et l'autre à l'Est de la cité. Deux autres marchés plus petits ont été ouverts à certaines périodes de l'histoire des Tang, et de nombreux lieux de commerce se trouvaient dans toute la ville (auberges, tavernes, lupanars, etc.). C'est à proximité du Marché oriental que se situaient deux des quartiers les plus animés de la ville, le quartier des courtisanes et celui des étudiants, ainsi qu'un troisième palais impérial, le Palais de la Venue de la Félicité. Au Sud-Ouest, un vaste parc organisé autour d'un étang artificiel avait été créé56,57. Les édifices religieux étaient disséminés à travers toute la ville, puisqu'on comptait 111 monastères bouddhistes, 41 abbayes taoïstes, 38 tombeaux familiaux, des églises et temples pour les religions étrangères (zoroastriens et nestoriens)58. De cette époque, subsistent en particulier deux grandes pagodes en briques, la Petite et la Grande pagode de l'oie sauvage59. On trouvait aussi 10 quartiers de ville avec des bureaux de représentation provinciaux, 12 importantes auberges et 6 cimetières58. Certains quartiers étaient littéralement remplis d'espaces publics ou des arrière-cours des manoirs les plus grands qui permettaient de jouer au polo ou au jeu de balle au pied (cuju)60. La capitale Tang était la plus grande ville du monde à cette époque, la population des quartiers de la ville et des faubourgs alentour atteignait 2 millions d'habitants61.
Cloche en bronze de Jingyun coulée en 711, 247 cm de haut, 6 500 kg.
Sortie printanière de la cour Tang, d'après Zhang Xuan, 713–755. Copie d'époque Song, détail

Il existait une capitale secondaire dans la ville de Luoyang, qui fut privilégiée par Wu Zetian. En 691, elle y fit déplacer plus de 100 000 familles (à peu près 500 000 personnes) de la région de Chang'an vers Luoyang pour peupler la cité62. Avec une population d'environ 1 million d'individus, Luoyang devint la seconde plus grande ville de l'empire. La cité était coupée en deux par la rivière Luo, entre une moitié nord à l'ouest de laquelle se trouvait une vaste enceinte comprenant le palais impérial et la ville impériale. Elle était également divisée en quartiers murés, et disposait de trois marchés principaux, accessibles par la rivière ou des canaux63. Avec la proximité de la rivière Luo, la ville bénéficiait de la fertilité de l'agriculture du sud, ainsi que du trafic commercial engendré par le Grand Canal62. Toutefois la cour Tang rétrograda finalement son statut de capitale et ne se rendit plus à Luoyang après 743, lorsque les problèmes d'approvisionnement de Chang'an furent finalement résolus62. Au début de l'année 736, des greniers furent construits à des points critiques le long de la route entre Jiangdu et Chang'an, ce qui élimina les délais de transport, les dégâts et les chapardages64. Un lac artificiel utilisé comme zone de transport fut dragué à l'est de Chang'an en 743, où les habitants du nord purent finalement voir une flotte de bateaux venant du sud de la Chine délivrer taxes et tributs à la cour impériale65.

Dans le reste de l'empire, les villes se développèrent grâce à l'essor du commerce, en particulier le long du Grand Canal ou près des routes maritimes. Cela profita notamment aux villes méridionales. Ce fut ainsi le cas de Jiangdu (Jiangsu, près de Yangzhou), localisée au croisement du Yangzi et du Grand Canal. Elle voyait donc passer les produits venant du bassin du Yangzi, des autres régions du Sud et du commerce maritime international et destinés à la capitale et aux autres villes du Nord, et devint rapidement l'un des principaux carrefours commerciaux de l'empire, surtout quand le monopole du sel y fut installé dans la seconde moitié du VIIIe siècle. Ce fut également un important centre de production artisanale. On estime que sa population comptait alors près de 500 000 habitants, alors qu'elle n'en aurait eu que 40 000 au début de la dynastie. Dans ce type de métropole provinciale, le contrôle étatique était moins fort, et en conséquence les marchés non réglementés proliférèrent, l'habitat se développa sans former des quartiers strictement délimités, s'étendant hors de l'ancienne muraille, au point qu'il fallut en ériger une nouvelle66,62,67. Comme le port de Guangzhou (Canton) plus au Sud, qui se développa considérablement grâce au commerce maritime, Jiangdu accueillait de nombreux marchands étrangers en provenance de toute l'Asie67,68.
Alimentation, thé et nécessités
Page du livre Le Classique du thé par Lu Yu.
Sculpture en terre cuite d'une femme, VIIe – VIIIe siècle. Sous la dynastie Tang les femmes hôtes préparent des festins, des parties de thé et des jeux de boissons avec leurs invités.

Les principaux ingrédients utilisés pour l'alimentation sont le blé, le riz, le millet panicule et millet de gluten, l'orge, le sésame, mais aussi l'ail, le sel, les navets, le soja, les poires, les abricots, les pêches, les pommes, les grenades, les jujubes, la rhubarbe, les noisettes, les pignons de pins, les châtaignes, les noix, l'igname, le taro, etc.69 Toutes sortes de viandes sont en plus consommées : porc, poulet, agneau (particulièrement dans le nord), loutre de mer, ours et même chameau69. Dans le sud, le long des côtes, les fruits de mer sont plus communément consommés, comme des méduses avec cannelle, poivre du Sichuan, cardamome et gingembre, ou encore des huîtres au vin, calamars frits, crabes, crevettes et poisson globe, que les Chinois appellent porcelet des rivières70. Certaines nourritures sont interdites par la cour Tang, comme le bœuf (il est précieux comme animal de trait), et entre 831 et 833 l'empereur Tang Wenzong bannit l'abattage de tout bétail en raison de ses croyances bouddhistes71.

Les repas ne se prenaient pas suivant des horaires fixes, même s'il existait un vieux principe voulant que l'on prenne trois repas par jour, au lever, au midi et au coucher du soleil. Dans les villes, les échoppes ambulantes et les auberges servaient des plats à toute heure. Chang'an était la mieux pourvue en ce type de commerces, puisqu'on y trouvait des restaurants servant des spécialités de toutes les provinces de l'empire72.

Les méthodes de préservation de la nourriture étaient nombreuses et pratiquées à travers toute la Chine. Le peuple utilisait des méthodes simples de préservation, comme creuser des trous de stockage, la saumure et le salage des aliments73. L'empereur possédait d'importantes glacières dans les parcs de la capitale afin de préserver la nourriture ; les élites en possédaient également mais de taille plus modeste74. Chaque année, l'empereur employait des travailleurs pour tailler 1 000 blocs de glace dans les ruisseaux gelés des montagnes, chaque bloc mesurant 0,91 m sur 0,91 m sur 1,06 m74. De nombreux mets glacés étaient appréciés durant les étés, notamment le melon frappé74.

Durant les précédentes dynasties du Nord et du Sud (420-589), et peut être même avant, boire du thé était populaire en Chine du sud. Cette boisson était vue comme un breuvage offrant un réel plaisir gustatif mais pouvant être également consommée dans un but pharmacologique15. Durant la dynastie Tang, le thé devient synonyme de sophistication dans la société. Les connaisseurs en distinguaient plusieurs variantes, crus, méthodes de récolte, et étaient prêts à payer les plus réputés à prix d'or75. Le poète Lu Tong (790-835) consacra la plupart de ses poèmes à son amour du thé. L'auteur du VIIIe siècle Lu Yu (connu sous le surnom de « Sage du thé ») a même écrit un traité sur l'art de boire le thé, appelé Le Classique du thé76.

Grâce au commerce extérieur, la Chine achetait des poires de Samarkand, des dattes, pistaches et figues de Perse, des pignons de pin et du ginseng de Corée et des mangues de l'Asie du Sud-Est77,78. En Chine, la demande pour le sucre était importante. Durant le règne de Harsha (606–647) en Inde du nord, les ambassadeurs indiens en Chine amenèrent deux fabricants de sucre qui apprirent avec succès aux Chinois à cultiver leur propre canne à sucre79,80.

Bien que le papier d'emballage était utilisé en Chine depuis le IIe siècle av. J.-C.81, les Chinois de la période Tang l'utilisaient pour réaliser des sacs carrés pliés et cousus pour transporter et préserver la saveur des feuilles de thé81. En fait, le papier possédait de nombreuses autres utilisations à cette époque. Ainsi, le premier usage de papier toilette remonte à 589 et est attribué au fonctionnaire Yan Zhitui (531–591)82. En 851, un voyageur musulman commente comment les Chinois de la période Tang ne sont pas attachés à la propreté puisqu'ils n'utilisent pas d'eau pour se laver dans la salle de bains. Au lieu de cela, dit-il, ils utilisent uniquement du papier pour s'essuyer82.
Loisirs
Femme jouant au weiqi (jeu de go). Section d'un paravent, tombe 187 Astana (Turfan, Xinjiang). H.: 63 cm. Encre et couleurs sur soie, VIIIe siècle.
Joueuse de polo, VIIIe siècle.

Bien plus que les périodes précédentes, la période Tang est connue pour le temps consacré aux loisirs, en particulier pour les classes les plus aisées83. De nombreuses activités d'extérieur sont appréciées sous les Tang, dont le tir à l'arc84, la chasse85, la pêche, la conduite de chars qui sont depuis de nombreux siècles prisées par les élites masculines chinoises, mais aussi le polo d'importation récente86, le jeu de balle au pied appelé cuju87, les combats de coq88 et même le tir à la corde89. Toute la bonne société se réunit pour de telles activités, qui mêlent souvent hommes et femmes de diverses générations. Les cercles littéraires s'étaient développés durant la période de division et étaient encore très prisés sous les Tang. Les lettrés s'y réunissaient pour participer à des joutes poétiques très élaborées, consistant notamment à composer des poèmes suivant des règles strictes (dans un style précis, en employant un nombre limité de mots, des figures imposées, etc.). Les jeux de table étaient également très appréciés, comme le mahjong et le weiqi. Dans tout le pays, des conteurs, danseurs, musiciens et bateleurs exécutaient des spectacles, à l'origine du théâtre chinois qui se développa sous les Song90.

Pour toutes les grandes occasions, des banquets copieux et gargantuesques sont préparés. Ceux de la cour impériale étaient évidemment les plus impressionnants91. On peut noter par exemple, l'organisation d'un festin pour 1 100 aînés de Chang'an en 664, un festin pour 3 500 officiers de l'Armée de la divine stratégie en 768, ou un autre pour 1 200 femmes du palais et membres de la famille impériale en 82691. Pour l'organisateur d'un banquet, il importe que chacun de ses convives soit honoré à sa juste mesure : sa table doit donc être abondamment garnie92. Boire du vin et des boissons alcoolisées est une pratique enracinée dans la culture chinoise, puisque les gens boivent pour chaque évènement social93, rarement au cours d'un repas, ou sinon à la fin de celui-ci. Les convives doivent boire leur coupe chacun à leur tour en fonction de leur rang94.
Les étrangers en Chine
Figurine d'un marchand probablement sogdien de la dynastie Tang, VIIe siècle.

Au cours de la dynastie Tang, des milliers d'étrangers viennent et vivent dans différentes villes chinoises pour le commerce, nouant ainsi des liens commerciaux entre la Chine et notamment les Perses, les Arabes, les Indiens, les Malais, les Cingalais, les Khmers, les Chams, les Juifs et les Chrétiens nestoriens parmi d'autres62,95. Des quartiers pour les marchands étrangers avaient été constitués dans les villes où ils étaient le plus nombreux, afin de les contrôler. Celui de Canton est bien connu par les textes. Il avait son propre représentant issu de sa communauté. Mais on trouvait des marchands arabes et perses plus au Nord, sur le Grand Canal, notamment à Jiangdu, mais aussi dans les capitales du Nord, Chang'an et Luoyang. Dans cette région cependant c'étaient les personnes venues de l'Asie centrale qui étaient les plus importantes en nombre : Turcs, Ouïghours et Sogdiens96.

Ce sont surtout les Sogdiens qui ont joué un rôle prépondérant, car c'est eux qui maitrisaient et contrôlaient l'essentiel des voies de commerce de l'Asie centrale, dont la Route de la Soie dans sa presque totalité. Respectés par les Chinois comme un grand peuple à l'esprit très commerçant et cultivé, ils étaient le principal lien entre l’Extrême-orient et l'Occident. Les Sogdiens ont ainsi joué un rôle fondamental dans la transmission de connaissances, de savoir-faire, de philosophies et de religions dans les deux sens, dont le manichéisme, le mazdéisme et le nestorianisme, comme ils l'avaient déjà fait plus anciennement avec le bouddhisme dès l'ouverture de la Route de Soie97.

L'aspect cosmopolite de Chang'an fut le sujet de nombreux écrits. Elle aurait compté à elle seule environ 25 000 étrangers98. Les femmes tokhariennes, exotiques avec leurs yeux verts et leurs cheveux blonds, servent du vin dans des verres en agate et en ambre, chantent et dansent pour attirer les clients99. Les étrangers n'étaient en effet pas uniquement impliqués dans le commerce à longue distance, puisque beaucoup (notamment les Ouïghours mais aussi les Sogdiens) étaient connus (souvent en mal) pour leurs activités de prêteurs, ou de tenanciers de tavernes100. Les chansons, danses et instruments de musique en provenance de l'Asie centrale étaient très populaires, et avec eux leurs spécialistes étrangers101,102,103. Les danseuses sogdiennes furent ainsi très appréciées par Xuanzong et sa concubine Yang Guifei, grands amateurs de musique et de danse en général, même si l'aspect sensuel de leurs danses ne manquait pas d'en choquer certains104 ; l'empereur affectionnait en particulier la « danse tournoyante occidentale » (huxuan wu). Les diplomates se rendant à la cour impériale et y portant des tribus sont un autre thème qui se retrouve à plusieurs reprises dans la littérature et l'art de l'époque, qui y voyaient un signe de la centralité de leur empire et s'émerveillent devant les nombreux produits exotiques et étranges qu'ils apportaient105. Une autre figure récurrente des descriptions des étrangers par les Chinois de l'époque Tang sont les moines bouddhistes étrangers, à qui on prêtait des pratiques scandaleuses : sexualité dissolue, commerce de femmes, et aussi connaissance de rituels occultes que l'on imputait souvent aux étrangers à l'apparence la plus énigmatique106.

Le gouvernement Tang émit plusieurs lois régulant les relations entre les Chinois et les étrangers. Si un étranger en Chine demandait une femme chinoise en mariage, il était contraint de rester en Chine et n'était pas autorisé à ramener son épouse dans son pays d'origine, comme le prévoyait la loi de 628 afin de protéger les femmes des mariages de courte durée avec les délégataires étrangers107. Plusieurs lois renforcèrent la ségrégation des étrangers des Chinois durant la dynastie Tang. En 779, un édit fut publié pour forcer les Ouïghours de la capitale à s'habiller avec leurs habits traditionnels, à les empêcher de se marier avec des femmes chinoises et à leur interdire de se faire passer pour des Chinois108. Les mesures se durcirent durant les années 830-840, conjointement aux mesures de répression des religions étrangères qui avaient un arrière-fond xénophobe : interdiction de contact entre les Chinois et les étrangers (« gens de couleur », c'est-à-dire les personnes originaires d'Asie centrale et du Sud-Est asiatique) en 836, et interdiction de leurs religions en 845, stipulant qu'il fallait empêcher qu'ils n'altèrent la morale chinoise109.
Références

↑ Kamenarovic 1999, p. 230.
↑ Lewis 2009, p. 182-183.
↑ Kamenarovic 1999, p. 144-145.
↑ Kamenarovic 1999, p. 230-231.
↑ Lewis 2009, p. 186-188.
↑ Kamenarovic 1999, p. 231.
↑ Kamenarovic 1999, p. 142-144.
↑ Kamenarovic 1999, p. 145-146.
↑ Lewis 2009, p. 179.
↑ Lewis 2009, p. 180-182.
↑ Benn 2002, p. 32.
↑ Benn 2002, p. 60.
↑ a et b Benn 2002, p. 64–66.
↑ Benn 2002, p. 66.
↑ a et b Ebrey 1999, p. 120.
↑ Lewis 2009, p. 184-186.
↑ Ebrey 1999, p. 114–115.
↑ Lewis 2009, p. 183-184.
↑ Kamenarovic 1999, p. 235-236.
↑ Schafer 1985, p. 28–29.
↑ Kamenarovic 1999, p. 236.
↑ Kamenarovic 1999, p. 237-238.
↑ Les études « classiques » sur cette élite : (en) D. G. Johnson , The Medieval Chinese Oligarchy, Boulder, 1977 et (en) P. B. Ebrey, The Aristocratic Families of Early Imperial China: A Case Study of the Po-ling Ts’ui Family, Cambridge, 1978.
↑ Lewis 2009, p. 200-201.
↑ Lewis 2009, p. 195-199.
↑ Lewis 2009, p. 199-200.
↑ Lewis 2009, p. 202-205.
↑ Lewis 2009, p. 206.
↑ Cf. à ce sujet (en) N. Tackett, The Destruction of the Medieval Chinese Aristocracy, Cambridge (Mass.), 2014
↑ a et b Lewis 2009, p. 129-136.
↑ Lewis 2009, p. 142-144.
↑ Adshead 2004, p. 83.
↑ Gernet 2005, p. 334-335.
↑ Gernet 2005, p. 311-313.
↑ Lewis 2009, p. 121-122.
↑ Gernet 2005, p. 331.
↑ Lewis 2009, p. 122-126.
↑ Gernet 2005, p. 331-332.
↑ Lewis 2009, p. 126-127.
↑ Kamenarovic 1999, p. 121-122.
↑ Lewis 2009, p. 127-128.
↑ Gernet 2005, p. 303-304.
↑ Lewis 2009, p. 21-25 et 138.
↑ (en) J. Kimura, « Historical development of shipbuilding technologies in East Asia », dans J. Kimura (dir.), Shipwreck ASIA: Thematic Studies in East Asian Maritime Archaeology, Adelaïde, 2010 (lire en ligne [archive]), p. 5-9
↑ Lewis 2009, p. 113-118.
↑ Lewis 2009, p. 139-140.
↑ Lewis 2009, p. 137.
↑ Adshead 2004, p. 92-93.
↑ Auteur de l'image : CZDK sur Wikipedia en anglais
↑ Kamenarovic 1999, p. 126.
↑ Kamenarovic 1999, p. 128-129.
↑ Gernet 2005, p. 333-334.
↑ Lewis 2009, p. 118-119.
↑ Lewis 2009, p. 119-120 et 138-139.
↑ Pour une étude détaillée de cette cité sous les Sui et les Tang, voir (en) V. C. Xiong, Sui-Tang Chang'an: a study in the urban history of medieval China, Ann Arbor, 2000
↑ Kamenarovic 1999, p. 60-68.
↑ Lewis 2009, p. 86-99.
↑ a et b Benn 2002, p. xiii.
↑ Elisseeff 2008, p. 268-271.
↑ Benn 2002, p. xiv, xv, xvi, xvii, xviii.
↑ Ebrey, Walthall et Palais 2006, p. 93.
↑ a b c d et e Benn 2002, p. 46.
↑ Lewis 2009, p. 99-101.
↑ Schafer 1985, p. 18–19.
↑ Schafer 1985, p. 19–20.
↑ Lewis 2009, p. 116.
↑ a et b Schafer 1985, p. 17–18.
↑ Reischauer 1940, p. 143–144.
↑ a et b Benn 2002, p. 120.
↑ Benn 2002, p. 121.
↑ Benn 2002, p. 125.
↑ Kamenarovic 1999, p. 218-220.
↑ Benn 2002, p. 126–127.
↑ a b et c Benn 2002, p. 126.
↑ Kamenarovic 1999, p. 221.
↑ Ebrey 1999, p. 95.
↑ Benn 2002, p. 123.
↑ Schafer 1985, p. 1–2.
↑ Sen 2003, p. 38–40.
↑ Adshead 2004, p. 76, 83–84.
↑ a et b Needham 1986d, p. 122.
↑ a et b Needham 1986d, p. 123.
↑ Benn 2002, p. 149.
↑ Benn 2002, p. 39, 170.
↑ Benn 2002, p. 22, 32.
↑ Benn 2002, p. 16, 90.
↑ Benn 2002, p. 151–152.
↑ Benn 2002, p. 173–174.
↑ Benn 2002, p. 152.
↑ Kamenarovic 1999, p. 212-216.
↑ a et b Benn 2002, p. 132.
↑ Kamenarovic 1999, p. 220.
↑ Benn 2002, p. 142–147.
↑ Kamenarovic 1999, p. 220-221.
↑ Schafer 1985, p. 20.
↑ Lewis 2009, p. 169-170.
↑ E. de la Vaissière, Histoire des marchands sogdiens, Paris, 2004
↑ Ebrey, Walthall et Palais 2006, p. 112.
↑ Schafer 1985, p. 21.
↑ Lewis 2009, p. 170.
↑ Ebrey, Walthall et Palais 2006, p. 114.
↑ Whitfield 2004, p. 255.
↑ Gernet 2005, p. 355.
↑ Lewis 2009, p. 171-172.
↑ Lewis 2009, p. 164.
↑ Lewis 2009, p. 176-178.
↑ Schafer 1985, p. 25.
↑ Schafer 1985, p. 22.
↑ Gernet 2005, p. 370-371.

Bibliographie

(en) Patricia Buckley Ebrey, The Cambridge Illustrated History of China, Cambridge, Cambridge University Press, 1999 (ISBN 0-521-66991-X)
(en) Patricia Buckley Ebrey, Anne Walthall et James B. Palais, East Asia: A Cultural, Social, and Political History, Boston, Houghton Mifflin, 2006 (ISBN 0-618-13384-4)
Jacques Gernet, Le Monde chinois. Tome 1, De l'âge du bronze au Moyen Âge (2100 av - Xe siècle après J.-C.), Paris, Armand Colin. Pocket, Agora, 2005, 380 p. (ISBN 2266153684)
(en) Samuel Adrian M. Adshead, T'ang China : The Rise of the East in World History, New York, Palgrave Macmillan, 2004 (ISBN 1-4039-3456-8)
Ivan P. Kamenarovic, La Chine Classique, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Guide des civilisations », 1999
(en) Mark Edward Lewis, China's Cosmopolitan Empire : The Tang Dynasty, Cambridge et Londres, Belknap Press of Harvard University Press, coll. « History of imperial China », 2009
(en) Charles Benn, China's Golden Age: Everyday Life in the Tang Dynasty, Oxford University Press, 2002 (ISBN 0-19-517665-0)
(en) Edward H. Schafer, The Golden Peaches of Samarkand: A study of T’ang Exotics, Berkeley and Los Angeles, University of California Press, 1985 (1re éd. 1963) (ISBN 0-520-05462-8)
(en) Tansen Sen, Buddhism, Diplomacy, and Trade: The Realignment of Sino-Indian Relations, 600–1400, Manoa, Asian Interactions and Comparisons, a joint publication of the University of Hawaii Press and the Association for Asian Studies, 2003 (ISBN 0-8248-2593-4)
(en) Joseph Needham, Science and Civilization in China: Volume 4, Physics and Physical Engineering, Part 2, Mechanical Engineering, Taipei, Caves Books, 1986
(en) Joseph Needham, Science and Civilization in China: Volume 5, Chemistry and Chemical Technology, Part 1, Paper and Printing, Taipei, Caves Books, 1986
Danielle Elisseeff, Art et archéologie : la Chine du néolithique à la fin des Cinq Dynasties (960 de notre ère), Paris, École du Louvre, Éditions de la Réunion des Musées Nationaux (Manuels de l'École du Louvre), 2008, 381 p. (ISBN 9782711852697)
(en) Edwin O. Reischauer, « Notes on T'ang Dynasty Sea Routes », Harvard Journal of Asiatic Studies, vol. 5, no 2,‎ 1940, p. 142–164 (DOI 10.2307/2718022, JSTOR 2718022)
(en) Susan Whitfield, The Silk Road: Trade, Travel, War and Faith, Chicago, Serindia, 2004 (ISBN 1-932476-12-1)


(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Tang Dynasty » (voir la liste des auteurs).

(fr) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en français intitulé « Dynastie Tang » (voir la liste des auteurs).

sources : https://fr.wikipedia.org/wiki/Soci%C3%A9t%C3%A9_sous_la_dynastie_Tang
Revenir en haut Aller en bas
L'auteur de ce message est actuellement banni du forum - Voir le message
 

La gerre des Dynasties ( Notes on T'ang Dynasty Sea Routes ) 1/1

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

 Sujets similaires

-
» document ultra secret de la gerre electronique des USA
» WikiLeaks, quelques notes.
» Les routes de la terreur (Documentaire)
» Green Book : Sur les routes du sud
» 25 Routes aériennes prouvent que la terre est plate

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Planète Révélations :: Informations Mondiales :: Services secrets / monde du Renseignement / Espionnage-