Pfizer, leader mondial de l'industrie pharmaceutique, a fait pression (avec succès) sur le procureur général du Nigéria pour qu'il abandonne une action en justice. En cause, un essai pharmaceutique controversé qui a provoqué la mort de 11 enfants.
En 1996, au Nigéria, une épidémie de méningite fait des milliers de malades. Les médecins de Pfizer traitent 200 enfants, la moitié avec l'antibiotique expérimental Trovan (*) et l'autre avec le médicament couramment utilisé aux États-Unis à l'époque, le ceftriaxone. Cinq enfants sont morts dans le premier cas, six dans le second. Un bon résultat, pour le Big Pharma, au regard de la gravité de la maladie. Sauf que beaucoup d'autres enfants traités au Trovan seraient aujourd'hui atteints de graves séquelles (lésions du cerveau, paralysie, ...). Et, après enquête, le gouvernement local est arrivé à la conclusion que Pfizer n'avait pas demandé l'autorisation aux parents avant d'expérimenter son médicament sur les enfants !
Petits arrangements entre ennemis...
Du coup, le gouvernement nigérian porte l'affaire en justice. 29 chefs d'accusation sont retenus, dont "comportement antiéthique, comportement délictueux, complot, dissimulation et la mort de victimes innocentes". Six milliards de dollars de dommages et intérêts sont réclamés au labo. Le procès commence en juin 2007. En octobre 2009, surprise ! Pfizer annonce avoir signé un accord amiable avec le gouvernement, annulant toutes les affaires en cours. Pour la modique somme de... 75 millions de dollars ! Pourboires compris. Bien entendu, les termes de l'accord restent secrets.
... en tout bien, tout (dés)honneur !
Un nouveau câble révélé par Wikileaks, et publié hier par The Guardian, affirme que Pfizer aurait engagé des enquêteurs pour fouiller dans la vie privée (et peu professionnelle) du procureur général du Nigéria, Michael Aondoakaa. Objectif : trouver des affaire de corruption l'impliquant, et les publier rapidement dans la presse en sous-entendant que d'autres affaires beaucoup plus graves pourraient suivre. Ce qui fut fait, en février et mars 2009. Résultat, quelques mois plus tard, tout ce beau monde se serrait la main, un grand sourire aux lèvres... Elle n’est pas belle, la vie ?
(* : Le Trovan sera homologué en Europe, en 1997, pour les adultes, et rapidement retiré du marché suite à des soupçons de toxicité hépatique, selon Wikipedia)
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