Le 15 octobre, le jour où «les indignés» est devenu un mouvement global
Il y a une semaine, les événements annonçant les «occupations» se sont multipliées sur les pages Facebook — plusieurs centaines dans le monde, une centaine rien qu’aux Etats-Unis — pour faire de ce 15 octobre la journée mondiale des Indignés. L’appel est un succès. Samedi, des groupes plus ou moins grands se sont retrouvés de Rome à Bruxelles, de New York à Taipei, raconte le BBC. Kuala Lumpur, Buenos Aires, Santiago du Chili, Los Angeles, São Paulo, ajoute el Pais. Tout juste cinq mois après la naissance du premier rassemblement, à Madrid, les actions dénonçant la faillite du «capitalisme financier» sont désormais planétaires.
«Les puissances dirigeants travaillent pour le bénéfice de quelques-uns, ignorant la volonté du plus grand nombre et le coût humain et environnemental que nous aurons à payer», écrivent sur leur site les «organisateurs» qui pointent des rassemblements dans 951 villes et 82 pays. «Il faut en finir avec cette situation intolérable. En parlant d’une seule voix, nous dirons aux politiques et aux élites financières qu’ils servent qu’est venu le temps, pour nous le peuple, de décider de notre avenir».
Selon le décompte d’Associated Press, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont défilé dans les rues des grandes villes européennes. Plus ou moins pacifiquement. Ainsi à Rome, où la paralysie politique radicalise la jeunesse, le rassemblement est devenu violent. Près de 70 blessés, une douzaine d’arrestations, des véhicules incendiés et des jets de bouteilles conter le ministère de la défense, raconte Ansa.
Plus de 10.000 personnes ont manifesté à Berlin, 2.000 à Sydney en Australie, quelques centaines à Auckland en Nouvelle-Zélande, et en Corée, etc. Devant la bourse de Taiwan à Taipei, un manifestant a expliqué à la BBC comment ce mouvement était devenu global : «Il n’y a pas qu’aux Etats-Unis que les inégalités sont devenus un énorme problème». Même au Japon, 200 personnes ont défilé dans les rues de Tokyo pour attirer l’attention sur la pauvreté.
Mais c’est surtout en Espagne, berceau du mouvement, que les «indignés» se sont regroupés en masse. Selon le décompte d’el Pais, un demi-million de personnes s’est retrouvé la porta del Sol, là où tout à commencé. 600.000 à Barcelone.
Aux Etats-Unis, où le mouvement prend de l’ampleur sous l’appellation #Occupy se décline avec le nom de la ville derrière (Occupy New York, Occupy Denver, Occupy Chicago), quelques dizaines de manifestants ont été arrêtés, les municipalités leur ayant donné l’ordre de quitter leurs lieux d’occupation.
Photo: Carte des rassemblements sur le site 15octobre.net
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ROME (AFP) - Le mouvement des "indignés" contre la crise et la finance mondiale a pris ce week-end une dimension planétaire, poussant dans la rue des dizaines de milliers de personnes dans des manifestations marquées par des incidents et des arrestations à Rome et New-York.
"Le mouvement des indignés renaît comme une force globale", proclame en une dimanche le quotidien El Pais, premier quotidien d'Espagne, où le 15 mai, les premiers indignés avaient dressé leurs tentes en plein coeur de Madrid.
"C'est la première fois qu'une initiative citoyenne réussit à organiser de manière coordonnée tant de manifestations dans des lieux aussi disparates et éloignés", se félicite le journal.
Sous les slogans "Peuples du monde, levez-vous" ou "Descends dans la rue, crée un nouveau monde", les "indignés" avaient appelé à manifester dans 951 villes de 82 pays, selon le site 15october.net, contre la précarité liée à la crise et le pouvoir de la finance.
"Il existe désormais de toute évidence un mouvement international", renchérit l'éditorialiste de la Repubblica Eugenio Scalfari, qui en fait remonter les prémices au "printemps arabe", voire même à la révolte des banlieues en France en 2008 et 2010.
"Il exprime la colère d'une génération sans avenir ni foi dans les institutions traditionnelles, politiques mais aussi financières, tenues responsables de la crise et profiteuses des dommages causés au bien commun", poursuit l'éditorialiste.
"Le monde descend dans la rue, unique, pacifique et coloré", renchérit la Stampa, bien que la manifestation de Rome ait été la plus violente, perturbée dès le début par des éléments non contrôlés qui ont saccagé des vitrines et incendié des voitures. Les heurts avec la police y ont fait 70 blessés, dont trois graves. Douze personnes ont été interpellées.
Outre Rome, où des dizaines de milliers de personnes avaient manifesté pacifiquement, Madrid et Lisbonne ont vu les plus gros défilés.
Des milliers de personnes ont également manifesté à Washington et New-York, où 88 personnes ont été arrêtées.
"Nous sommes le peuple", on nous a vendus", s'insurgeaient-ils. "Chaque jour, chaque semaine, occupons Wall Street".
A Londres, plusieurs centaines d'"indignés" ont passé la nuit de samedi à dimanche sur le parvis de la cathédrale Saint-Paul, où 70 tentes ont été érigées au coeur de la City, après le rassemblement de la veille, marqué lui aussi par quelques heurts et cinq arrestations.
"Nous allons rester aussi longtemps qu'il faudra pour que le gouvernement nous entende et dise qu'il va changer les choses", a expliqué Spyro Van Leemnen, 27 ans, un des représentants du mouvement Occupy London Stock Exchange.
Pour lui, la manifestation vise à "démocratiser le système financier", et les rassemblements, à Londres et partout dans le monde "sont un premier pas".
Amsterdam a également vu pousser 50 tentes, plantées sur la place de la Bourse, où des indignés ont passé la nuit.
Genève, Miami, Paris, Sarajevo, Zurich, Mexico, Lima, Santiago, Hong-Kong, Tokyo, Sydney.... "L'indignation" contre le capitalisme s'est exprimée samedi sur pratiquement tous les continents.
Et a reçu le même jour le soutien inopiné du gouverneur de la Banque d'Italie, Mario Draghi, grand commis de l'Etat, ancien membre de la direction de la banque américaine Goldman Sachs, devenue le symbole des dysfonctionnements du monde de la finance anglo-saxonne.
"Ils sont en colère contre le monde de la finance. Je les comprends", a déclaré cet économiste de 64 ans, qui prendra la tête de la Banque centrale européenne le mois prochain.
© 2011 AFP
Le fondateur du site WikiLeaks haranguait la foule samedi à Londres, au milieu des manifestants «indignés» du quartier des affaires de la City.
Julian Assange face à la foule des indignés de Londres. © KEYSTONE
Quelque 800 «indignés» rassemblées samedi après- midi dans la City, coeur financier de Londres, ont reçu le renfort inopiné du fondateur de Wikileaks Julian Assange. Mais sont restés fermement contenus par la police à distance de la bourse de Londres.
L’arrivée d’Assange, qui est en liberté conditionnelle dans un manoir près de Londres en attendant une éventuelle extradition vers la Suède où il est poursuivi pour viol, a suscité des cris de joie. «Nous soutenons ce qui se passe ici parce que le système bancaire à Londres est le bénéficiaire d’argent issu de la corruption», a lancé le fondateur de WikiLeaks sur les marches de la cathédrale Saint-Paul, où étaient massés les manifestants.
Assange, entouré de gardes du corps, a dû se frayer un chemin à travers un important cordon policier cernant la manifestation.
Heurts mineurs
Scotland Yard, sévèrement critiquée pour son manque de réactivité lors des émeutes en août dernier et de précédentes manifestations étudiantes, avait mis en place un imposant dispositif.
Des heurts mineurs avec la police se sont produits à la mi- journée alors que certains manifestants ont tenté de se diriger vers le London Stock Exchange (bourse de Londres), mais un porte-parole de Scotland Yard a qualifié la manifestation de «largement pacifique».
Une personne a été arrêtée pour «agression d’un policier», selon Scotland Yard. La station de métro Saint-Paul a été fermée, mais la cathédrale, haut lieu touristique à Londres, restait ouverte aux visiteurs.
«Pas de coupes»
Les manifestants brandissaient des banderoles proclamant «Pas de coupes», en référence à la politique drastique d’austérité du gouvernement britannique, ou encore «Goldman Sachs est l’oeuvre du diable». Guitares et tambours mettaient de l’animation. Solidarité
Un collectif baptisé «OccupyLSX» avait appelé à la manifestation sur le modèle de «Occupy Wall Street». Ben Walker, un enseignant de 33 ans venu avec son sac de couchage projetait de «passer une ou deux nuits sur place».
«Je suis venu surtout par solidarité avec les mouvements qui se déroulent dans le monde entier», a-t-il confié. «Nous voulons qu’il y ait un peu de justice dans le système financier mondialisé».
De nombreux étudiants étrangers - d’Espagne, de Grèce et même de Séoul - participaient au rassemblement. La manifestation restait confinée autour de Saint-Paul, la police empêchant les manifestants de se diriger vers la bourse ou vers un square proche, où ils auraient pu s’installer durablement à l’instar des «indignés» de Wall Street.
Le rassemblement fait partie d’une journée d’action mondiale du mouvement multiforme des «indignés», né en Espagne au printemps. Sous le mot d’ordre «Unis pour un changement mondial», des manifestations sont prévues dans 951 villes de 82 pays, selon le site 15october.net.
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